Le drame de Strasbourg a enflammé la page Facebook des gilets jaunes d’Isère. Dans la nuit de mardi à mercredi, une série de posts conspirationnistes ont été approuvés et relayés par des dizaines d’internautes avant que tous les messages ne soient rapidement effacés par les gérants de la page. «Les politiciens qui montent des attentats pour décréter l’état d’urgence et terroriser les Français on vous voit»,pouvait-on lire sur un post. «Ah ça y est le gouvernement a trouvé un p’tit fiché S pour centrer la France sur un autre problème que les gilets jaunes», écrivait un autre manifestant. En face, nombre de gilets jaunes ont lancé des appels à la raison. «On est en train de perdre le sens du mouvement. Recentrons-nous sur nos revendications au lieu de monter des plans complotistes qui vont nous discréditer», écrit Isabelle. Certains tentent de calmer le jeu sans pour autant condamner les complotistes convaincus : «Les GJ, complot ou pas, le drame est réel nous devons être solidaires de cette tristesse. Nous ne devons pas nous engueuler entre nous. Que chacun garde son avis pour lui.»

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Au fil de la journée, un seul post faisant référence à Strasbourg est resté sur la page, remportant une massive adhésion : l’appel à «une minute de silence en hommage aux victimes» samedi. L’attentat dans lequel au moins trois personnes ont perdu la vie ne remet cependant pas en cause la mobilisation à venir, cet «Acte V» annoncé pour samedi. Sur le rond-point emblématique de Voreppe, à l’entrée nord de l’agglomération grenobloise, la vingtaine de gilets jaune présents convergent. «Cela n’aura pas d’effet sur la mobilisation de samedi. Le gouvernement a beau vouloir faire peur aux gens, ceux qui sont mobilisés le sont encore plus aujourd’hui, surtout les jeunes…», relève Patrick. Parmi ces fidèles du rond-point, le plus gros du département installé dès le 17 novembre, certains penchent aussi pour la thèse du complot mais ils ne sont pas majoritaires. Ce qui unit tout le monde, c’est encore et toujours le discours d’Emmanuel Macron de lundi soir mais aussi l’idée que l’Etat traite avec plus de sévérité les gilets jaunes que les fichés S. Ce qui énerve les manifestants. «Attention à l’effet boomerang», avertit Alex dans le concert de klaxons quasi ininterrompu des voitures et camions qui passent à côté. Patrick hoche la tête, dépité : «Il y en a quand même moins que la semaine dernière…»

François Carrel correspondant à Grenoble