• Article 24 : une commission de réécriture priée de ne pas réécrire

    Par Sacha Nelken — 27 novembre 2020 à 20:51
    Le Premier ministre, Jean Castex, et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, à l’Assemblée nationale, mardi, jour du vote de la loi «sécurité globable». Le Premier ministre, Jean Castex, et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, à l’Assemblée nationale, mardi, jour du vote de la loi «sécurité globable». Photo Marc Chaumeil

    Après avoir annoncé jeudi qu’une instance indépendante serait chargée de rédiger une nouvelle mouture de l’article 24, Jean Castex a dit l’inverse le lendemain.

    Apeine annoncée, déjà critiquée. En communiquant jeudi soir, sur la mise en place d’une commission indépendante «chargée de proposer une nouvelle écriture de l’article 24» de la proposition de loi très controversée dite «sécurité globale», le gouvernement espérait apaiser dans un contexte de fortes tensions, ravivées jeudi par la révélation de nouvelles violences policières par Loopsider. Il aura en fait provoqué la colère de l’ensemble du Parlement. Pour les députés et sénateurs de tous bords, l’instauration d’une telle instance «méprise» le travail parlementaire.

    «A quoi servons-nous ?»C’est que quarante-huit heures avant l’annonce de Jean Castex, les députés venaient justement de voter en première lecture le texte. Face à une forte contestation de la gauche, les parlementaires du groupe La République en marche (LREM) s’étaient mobilisés en masse pour que la proposition de loi soit largement adoptée. Mardi soir, 388 députés donnaient leur feu vert au texte, quand 104 s’y opposaient.

     

  • Article 24 : Castex répond à Ferrand... et se contredit

    Par Lilian Alemagna — 27 novembre 2020 à 17:26
    Jean Castex et Richard Ferrand lors de l'hommage à Maurice Genevoix, le 11 novembre au Panthéon.Jean Castex et Richard Ferrand lors de l'hommage à Maurice Genevoix, le 11 novembre au Panthéon. Photo Ludovic Marin. AFP

    En réponse au président de l'Assemblée indigné de voir une «commission indépendante» prendre la place du travail des députés, le Premier ministre promet finalement ce vendredi que ce ne sera pas le rôle de cette instance de «proposer une réécriture d'une disposition législative».

    A ne plus rien comprendre… On pensait depuis jeudi soir que le gouvernement avait trouvé une parade pour étouffer la contestation contre le désormais fameux «article 24» de la proposition de loi sécurité globale : «une commission indépendante, chargée de proposer à la représentation nationale une nouvelle écriture» de cette disposition polémique «afin de respecter l’objectif poursuivi tout en dissipant tout doute sur le respect de la liberté d’informer». Mais ça c’était valable jeudi soir, dans un communiqué de presse envoyé par Matignon à 19h52, quelques minutes avant la prise de parole du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Depuis, les députés de la majorité se sont rebellés, le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand a appelé Jean Castex vendredi matin puis s’est fendu d’une lettre au même Premier ministre, pour mettre en garde contre une «atteinte aux missions du Parlement qui seul écrit la loi» et lui demande de «bien vouloir [lui] confirmer qu’il ne s’agit effectivement en aucun cas pour lui de proposer une réécriture d’un article voté par l’Assemblée nationale».

    Les vœux du troisième personnage de l’Etat ont été exaucés : dans un courrier envoyé cet après-midi par le chef du gouvernement au président de l’Assemblée nationale et que Libération s’est procuré, Castex renonce à faire réécrire l’article 24 par cette commission indépendante qui sera présidée par Jean-Marie Burguburu, président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) – instance très critique sur la proposition de loi sécurité et «composée de magistrats et de personnalités qualifiées»«Il n’entrera pas dans le périmètre de cette commission le soin de proposer une réécriture d’une disposition législative», écrit le Premier ministre. En totale contradiction, donc, de la formulation employée la veille : «Une commission indépendante, chargée de proposer à la représentation nationale une nouvelle écriture.»

     

    Dans sa réponse à Ferrand, Castex promet que cette «commission indépendante» fera des «propositions» qui «n’ont pas vocation à être seulement juridiques» mais qui «devront aussi plus largement porter sur des enjeux de procédures ou de formation ainsi que sur les conditions de travail et d’intervention de la presse et des forces de l’ordre». Cette commission n’apportera donc plus qu’un simple «éclairage […] en vue d’élaborer des propositions sur la meilleure manière de concilier le respect absolu du droit fondamental à l’information et la protection des forces de sécurité, indispensables dans une société démocratique». De quoi calmer sa majorité mais pas d’éteindre le feu avant des mobilisations, samedi, contre la proposition de loi Sécurité globale.

    Lilian Alemagna




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