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    Le mode de vie en Estonie

     

     

    Le mode de vie en Estonie

    Le mode de vie en Estonie

     

    L'Estonie, en forme longue la république d'Estonie (en estonien : Eesti et Eesti Vabariik), est un pays d'Europe du Nord situé sur les bords de la mer baltique.

    Elle partage ses frontières terrestres avec la Russie à l'est et avec la Lettonie au sud. La mer Baltique s'ouvre à l'ouest, séparant l'Estonie de la Suède, tandis que le golfe de Finlande, où se trouve la capitale, Tallinn, constitue une délimitation naturelle avec la Finlande au nord.

    L'Estonie possède des racines linguistiques et génétiques finno-ougriennes qui l’apparentent à la Finlande, souvent considérée comme le pays frère de l'Estonie. On y retrouve notamment le sauna, une mythologie riche ainsi qu'une culture du silence et un attachement particulier des Estoniens pour la nature. Ces caractéristiques, ajoutées à la forte influence des cultures germaniques et scandinaves, font de l'Estonie un pays nordique.

    Cependant, la situation géographique de l'Estonie et son histoire récente similaire à ses voisins méridionaux (la Lettonie et la Lituanie) conduisent souvent de nombreux observateurs à percevoir l'Estonie en tant que partie de l'ensemble géopolitique nommé pays baltes.

    Initialement peuplée de populations indigènes fenniques pendant plusieurs milliers d'années, l'Estonie a connue un âge Viking avant d'être conquise, colonisée puis convertie au christianisme par des chevaliers allemands au XIIe siècle. Pendant près de 700 ans, et à la manière de la Finlande (dominée alors par la Suède), le peuple estonien autochtone vit sous le contrôle et l'influence permanente de populations germaniques (noblesse venue du Nord de l'Allemagne et des pays scandinaves), qui affectent durablement leur culture et leur mode de vie.

    En parallèle, la lutte permanente des puissances voisines (Suède, Danemark, Empire russe...) pour le contrôle de cet emplacement stratégique tout au long de l'histoire déclenche en réponse une volonté d'émancipation de la part des estoniens à partir du XIXe siècle. Ces derniers, bien que majoritaires, sont dominés socialement et réduit au servage (voire à l'esclavage) pendant près de 700 ans. Ils réussissent néanmoins à tirer profit des luttes d'influences entre leurs anciens maitres allemands et la Russie impériale qui administre le territoire à cette époque, pour s'affirmer culturellement (le réveil national), puis politiquement tout au long du XIXe siècle.

    Les Estoniens se servent des troubles engendrés par la révolution russe de 1917 et de la fin de la Première guerre mondiale pour revendiquer leur indépendance à partir de 1918, qu'il finissent par obtenir en 1920 à la suite de leur victoire sur la Russie bolchévique lors de la guerre d'indépendance. De 1920 à 1940, la jeune république d'Estonie, tout comme la Finlande voisine, édicte pour la première fois ses propres règles en tant qu'état souverain et tente de se faire une place dans le concert des nations européennes modernes.

    En 1940, en pleine Seconde guerre mondiale, l'Estonie, ainsi que ses voisins baltes, sont militairement envahis par l'Union soviétique dans l'indifférence générale et conformément au pacte germano-soviétique d'août 1939. Le pacte est finalement violé par l'Allemagne nazie qui envahi le territoire en 1941. À partir de 1944 et après la défaite allemande, la Russie soviétique reprend le contrôle de l'Estonie et y impose un régime communiste. Ces occupations successives contraignent le gouvernement et une grande partie de la population à l'exil pour échapper aux crimes et déportations de masse, particulièrement les minorités ainsi que l’élite intellectuelle du pays.

    De 1945 à 1990, le territoire de l'Estonie est administré de force par l'URSS par le biais d’une république socialiste créée de toute pièces pour laisser penser à une adhésion de la population. Non-reconnue par les pays du Bloc de l'Ouest qui continuent de soutenir le gouvernement de la République en exil, notamment pendant la guerre froide, l’Estonie soviétique, à cette période constitue le seul « pays » nordique de l'URSS mais aussi le moins peuplé et le plus prospère. Elle est alors le territoire soviétique dont le niveau de vie se rapproche le plus des pays situés de l'autre côté du rideau de fer.

    Néanmoins, le régime autoritaire ainsi que le manque de développement économique et d'opportunités entraine le début d'une colère populaire dans tous les pays Baltes (et l'URSS tout entière), qui abouti progressivement à la chute de cette dernière au début des années 1990. En Estonie, ce mouvement de protestation prend la forme de la révolution chantante pacifique à partir de 1987 qui mène à la restauration de l'indépendance du pays le 20 août 1991.

    L’Estonie récupère alors ses institutions d'avant-guerre, de retour de l’exil, et reconstitue son état d’origine : une république parlementaire unitaire démocratique divisée en comtés avec comme capitale Tallinn, tandis que sa seconde ville Tartu reste le siège historique de sa principale université et de plusieurs institutions nationales.

    Consciente du retard de développement économique engendré par des décennies d'occupation, l'Estonie parie alors sur l'essor grandissant des nouvelles technologies de l'information consécutif à l'arrivée d'internet. Au milieu des années 1990, la stratégie du bond du tigre (en Estonien Tiigrihüpe), lancée par le gouvernement, organise le déploiement massif et accéléré d'infrastructures informatiques (notamment dans les écoles) et encourage l'utilisation du Web. L'éducation de sa population aux usages du numérique dès 1997, l'apparition de la carte d'identité numérique en 2002, du vote électronique en 2007, de la résidence digitale en 2014, ainsi que le programme e-Estonia de simplification des démarches administratives lui confère auourd'hui le statut de société digitale la plus avancée du monde. En découle un environnement propice à la création d'entreprises de l'économie numérique, qui place l'Estonie en tête du nombre de startups par habitants, avec notamment 9 licornes d'origine estonienne : Skype, Bolt, Playtech, Wise, Pipedrive, Zego, ID.me, Veriff et Glia.

    Grâce, entre autres, à l'économie numérique, l'Estonie est aujourd'hui un pays développé doté d'une économie qui a connu l'une des croissances les plus rapides de l'Union Européenne, qu'elle a rejoint en 20043. Le pays se classe à la trentième place en 2018 dans l'indice de développement humain et obtient des résultats favorables en termes de liberté économique, libertés civiles, éducation (régulièrement classé dans les premiers pays d'Europe)4 et liberté de la presse selon RSF (quatorzième dans le monde en 2020)5. Les citoyens estoniens bénéficient de soins de santé universels6 ainsi que d'une éducation gratuite et de qualité7,8. Par ailleurs, l'Estonie est également l'un des pays qui compte le plus de musées, de livres et le plus grand répertoire de chansons par habitant au monde.

    Avec une population de 1,3 million d'habitants, elle est l'un des membres les moins peuplés de l'UE ainsi que de l'OTAN depuis mars 2004. L'Estonie est également membre de la zone euro, de l'ONU, de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), du Conseil de l'Europe, de l'espace Schengen, de l'OCDE ou encore du Conseil des États de la mer Baltique, et est observateur au Conseil nordique, à l’Organisation internationale de la francophonie et à l'OCDE. En 2020 et 2021, l'Estonie siège au Conseil de sécurité des Nations unies9.

     


  • REPORTAGE. Ukraine : de Dnipro à Severodonetsk, une ligne de bus pour sauver des vies

      09h25 , le 3 avril 2022
    • Par
    • Antoine Malo
    • envoyé spécial à Dnipro et Severodonetsk (Ukraine)
     

    Alors que les troupes russes se rabattent vers l’est de l’Ukraine, le JDD a suivi un chauffeur sur sa ligne qui traverse le Donbass pour évacuer des civils.

    Anton, 40 ans, chauffeur du bus évacuant de Severodonetsk.

    Anton, 40 ans, chauffeur du bus évacuant de Severodonetsk. (Ricardo Garcia Vilanova)
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    En Ukraine , les nouveaux héros nés de la guerre ne ressemblent pas tous à Volodymyr Zelensky . Malgré leur quarantaine en commun, Anton serait même l’exact opposé de son président. Au charisme étudié de l’un, l’autre oppose une allure passe-muraille, avec ses godillots de cuir noir, son pull côtelé, de fins cheveux bruns plaqués vers l’avant. Quand le chef de l’État multiplie les discours passionnés, Anton voit ses joues couperosées s’empourprer un peu plus quand il doit prendre la parole.

     

    Anton n’aime pas gaspiller sa salive. Encore moins quand il prend sa pause, là, sur le parking d’une station-service perdue au milieu de nulle part, quatre heures après être parti de Dnipro, la grande ville du centre du pays. De ses voyages dont chacun pourrait être le dernier, il dit seulement : « Conduire, c’est mon métier. » Puis propose un peu de cette salade aux œufs que sa femme lui a préparée. Avale une dernière rasade de Jägermeister. « Il faut dormir, maintenant », ordonne-t-il. Quelques heures de mauvais sommeil allongé dans ce bus aux sièges râpés et il lui faudra reprendre le volant. Aller chercher ces gens, là-bas, dans l’Est, dans ce Donbass dont les Russes font désormais leur nouvelle priorité. En espérant qu’à Severodonetsk, la ville terminus aujourd’hui assiégée, les bombardements se calment le temps de son passage.

     

    Dans la gueule du loup

    Un bref coup d’œil à une carte de situation montre que prendre le chemin d’Anton revient un peu à se jeter dans la gueule du loup. Certes, sur les fronts sud et centre du Donbass, le cas de Marioupol mis à part, les forces ukrainiennes tiennent bon. Mais dans le Nord, là où le chauffeur se rend, la ville d’Izium est tombée vendredi tandis que poussent, dans le Sud, les combattants séparatistes de la République autoproclamée de Donetsk. Plus l’on s’enfonce vers l’est et plus le territoire ukrainien se rétrécit. Anton ne consulte jamais les cartes militaires, mais il sait mieux que personne qu’il ne reste qu’une seule route, exposée, pour rejoindre Severodonetsk.

     

    Lire aussi - « Que les Européens sachent que les Russes ne soutiennent pas tous la guerre » : des jeunes Russes témoignent

    Il est 6 heures, un soleil pâlot pointe à l’horizon et une méchante bise balaie la campagne. Anton est déjà debout. Trois voire quatre allers-retours par semaine vous règlent votre horloge. Sur la route, très vite, apparaissent les premiers terrils, caractéristiques de ce Donbass, terre de gueules noires avant d’être terre de conflits. Puis les sombres squelettes des usines sidérurgiques à l’arrêt. À la radio, les stations ukrainiennes laissent la place à des programmes russes ou séparatistes. La guerre se joue aussi sur les ondes.

     
     

    Les supposés couloirs humanitaires accordés par les Russes sont très rares. Et, à plusieurs reprises, ils ont tiré délibérément sur les civils

    Viennent Kramatorsk puis Slaviansk, deux villes de la région de Donetsk encore préservées des hostilités. Avec le renforcement annoncé des unités russes sur ce front est, cela pourrait ne pas durer. Les 40 kilomètres restants sont ceux d’une zone de guerre, déserts le plus souvent, traversés parfois par des ambulances ou des camions militaires qui viennent ravitailler le front. Anton fonce sur cette chaussée bordée de marécages. À un check-point, dans le sens opposé, s’est formée une file continue de voitures surchargées. « Civils », « Enfants », disent les affichettes scotchées sur les pare-brise arrière. Illusoires protections, pour ces populations fuyant les combats. « Nous avons pu organiser l’évacuation de plus de 18 000 civils depuis le 24 février, mais les supposés couloirs humanitaires accordés par les Russes sont très rares, accuse le gouverneur de la région de Louhansk, Sergiy Haidai. Et, à plusieurs reprises, ils ont tiré délibérément sur les civils. »

    Salves de tirs d’artillerie pendant l’embarquement

    Anton accélère quand le bus frise les zones tenues par l’ennemi, prend des obliques pour les éviter. Nouveau barrage. Un soldat allant sur la cinquantaine fanfaronne : « On va les baiser, les Russes, vous allez voir, on va les baiser ! »

    Ce n’est pas vraiment ce que disent les faubourgs de Severodonetsk, dont l’asphalte est mité de trous d’obus. Encore un check-point. Les militaires, très jeunes, sont moins exaltés que les précédents. Mais mieux équipés. Posé sur un des blocs de béton, un NLAW, cette arme antichar fournie par les Britanniques. À l’entrée de la ville, Azot, l’une des plus grandes usines chimiques en Europe, est intacte. Les premiers bâtiments du centre-ville le sont moins. Là, une station-service calcinée. Ici, un immeuble de l’ère soviétique frappé par un obus de mortier, dont plusieurs balcons semblent à deux doigts de se décrocher. Certains arbres sont sciés en leur milieu. Les fenêtres des magasins de l’avenue Hvardiiskyi ont pour la plupart explosé.

    Les quinze premiers jours, c’était gratuit et puis la compagnie a décidé de faire payer

    Anton arrive enfin devant la place de la Victoire, autrefois place Lénine, le cœur de la ville, qui comptait plus de 100 000 habitants il y a encore un mois. C’est là, au pied de cette banque, que rendez-vous est donné. Un endroit très exposé « mais pratique pour les gens », explique le chauffeur. Ce matin, ils sont une grosse cinquantaine à attendre, valises à la main. Leur calme est trompeur. Les mots disent la panique intérieure. Ludmila raconte ainsi qu’il y a plusieurs jours une frappe a mis le feu aux quatrième et cinquième étages de son immeuble. « C’était la vraie guerre », affirme-t-elle sans s’étendre davantage. Bonnet à pompon sur la tête, Ira, 55 ans raconte, le souffle court : « Pendant les quinze premiers jours de bombardement, j’ai continué à travailler en vendant du pain et des pâtes. Mais j’avais tellement peur ! Ensuite, on s’est cachés dans la cave. On avait encore du gaz et de l’électricité et on suivait ce qui se passait avec le téléphone de mon fils. » Une chance. Selon le gouverneur de la région de Louhansk, des pans entiers de la ville sont privés de courant, de chauffage et de télécommunications.

    L’embarquement se poursuit. Depuis les quartiers est, où l’armée russe a presque pris pied, résonne alors une première salve de tirs d’artillerie. Puis une deuxième, une troisième. « Ce sont les Ukrainiens, ça, et c’est assez loin », précise Andrii, devenu fin connaisseur. Ce trentenaire vit au centre-ville. « Mais, ces cinq derniers jours, ce n’était plus tenable, ça tapait vingt-quatre heures sur vingt-quatre. J’ai rejoint mes amis qui se terraient dans un sous-sol. Et on s’en va tous, maintenant. » Il tique quand un obus tiré cette fois par les Russes tombe un peu plus près. Il rejoint le car, s’acquitte des 1 000 hrivnas (30 euros), le tarif non négligeable de ce voyage. « Les quinze premiers jours, c’était gratuit et puis la compagnie a décidé de faire payer », explique Anton, un peu embarrassé.

    Sur la route, la peur, « tout le temps »

    Le bus s’est rempli, il redémarre. Un vieil homme, qui a choisi de rester, bénit ses occupants en dessinant dans le vide des signes de croix. « C’était un jour de chance, c’était calme », dira ensuite Anton. Sur la route, il s’arrête à Lyssytchansk, localité voisine elle aussi sous le feu. Katarina, 32 ans, monte avec sa fille. « Depuis ma fenêtre, j’ai vu tous ces combats, toutes les explosions, indique-t-elle dans ce français qu’elle enseigne à l’école. On ne sortait que deux fois par semaine pour faire les courses. » La jeune femme ne sait qui blâmer pour ce qui lui arrive. Ici, à la différence du reste du pays, la population subit depuis huit ans les conséquences de la guerre entre Kiev et les rebelles séparatistes.

    Les bombardements nous empêchent de récupérer les corps

    Anton repart. Lyssytchansk disparaît dans la brume. Deux heures plus tard, un obus y frappera l’appartement d’une famille. Selon le gouverneur de la région, une petite fille de 2 ans est morte le lendemain de ses blessures. « Dans l’oblast de Louhansk, nous avons dénombré 150 morts depuis le 24 février, déclare Sergiy Haidai. En réalité, les chiffres doivent être bien supérieurs mais les bombardements nous empêchent de récupérer les corps. » Il affirme qu’à Roubijne, bourg au nord de Severodonetsk, les cadavres sont enterrés au pied des immeubles.

    Il est 18 heures. Après six heures de trajet, le bus arrive à la gare centrale de Dnipro. Les nouveaux réfugiés se séparent, les uns pour un train en direction de l’ouest du pays, les autres pour une nuit chez des proches. Ira, la commerçante au bonnet, ne sait où aller. « On n’a nulle part où dormir. » Elle souhaiterait retourner chez elle au plus vite. Mais elle n’y croit pas et pleure. « Je suis certaine que la ville va être détruite. »

    Anton n’est pas plus optimiste. « Je crains que, tôt ou tard, Severodonetsk ne finisse encerclée. » En attendant, après une petite heure de pause, il est déjà prêt à y retourner. Il confesse qu’il a peur, « tout le temps », quand il fait cette route. Et qu’à la maison les disputes avec son épouse si inquiète sont fréquentes. Mais il demande aussi, comme s’il s’agissait d’une évidence : « Si je ne vais plus chercher ces gens, qui le fera ? »

     
     
     




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