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    « Libéral » est un mot qui peut signifier diverses choses, parfois même des choses contraires comme dans les idées politiques française et américaine comparées. Il peut concerner l’organisation civile de la société aussi bien que le système économique d’un pays. Il peut désigner un parti, associé ou non avec tel ou tel autre qualificatif en « al » ou en « iste ». En France il a cependant une connotation quasi unanime de repoussoir. La pensée politique de notre pays est si marquée par les idées collectivistes que même si on est tenté par le libéralisme on ne le dit pas trop fort. On n’ose à peine le penser intérieurement, on en a un peu honte.

    Bon, après cette petite entrée en matière vous allez ricaner. Il va encore nous accabler avec son « idéologie » libérale. Eh bien non, vous n’y êtes pas. Pas vraiment. Ce billet, tout simplement, se propose d’essayer de comprendre. Comprendre quoi ?

    Il est des pays développés où la richesse moyenne de la population augmente continuellement. Avec des hauts et des bas, avec des crises imprévues, avec des « cagnottes » tout aussi imprévues, mais bon an mal an la richesse augmente plus vite qu’ailleurs. Elle augmente globalement, et elle augmente pour tous, les riches deviennent plus riches, les pauvres deviennent moins pauvres. Ces pays, citons-en quelques-uns, ce sont par exemple les pays du Nord de l’Europe, les États-Unis, l’Allemagne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande…Pays ou la protection sociale est comparable, à l’exception notable des États-Unis, à celle de la France.

    Ces pays ont en commun de tous pratiquer une économie libérale, plus ou moins libérale certes, mais plus libérale que collectiviste. Et surtout, malgré des soubresauts parfois violents, le taux de chômage s’y maintient dans une moyenne bien plus favorable que dans les autres pays, dont la France. Et lorsque survient un accident de parcours, ces pays en guérissent à un rythme spectaculaire. Ainsi les États-Unis dont le chômage oscillait entre 4 et 6% de 2000 à 2008 virent la crise des « subprimes » faire grimper ce taux à 10% en 2010. Mais il redescendit très vite à 8% en 2012, et encore bien moins actuellement. Le chômage australien descendait régulièrement depuis 2000 (7%) à 2008 (4,2%), il remonte à 5,6% en 2009 et retombe à 5,1% en 2010 puis 5% dès 2012.

    Alors comprendre quoi ? Comprendre comment il se fait que de nombreuses personnes qui pourtant connaissent cette relation entre libéralisme économique et amélioration du sort des populations, persistent à préférer les contraintes étatiques. Parmi ces personnes, il n’est pas douteux qu’un grand nombre agit en toute sincérité. Alors d’où vient cette distorsion entre résultats constatés et préférences politiques ?

    Beaucoup de raisons personnelles, certainement, en provenance du milieu familial et professionnel. En provenance de l’éducation, de l’histoire intime, des expériences collectives et individuelles. Néanmoins on repère une constante dans la tournure d’esprit de ces hommes et femmes. Le mot juste s’avère difficile à trouver ; ce qui s’en approche le mieux pourrait être « croyance aux données figées ».

    C’est un blocage qui consiste consciemment ou non à penser l’économie ainsi : un problème nous est posé, avec ses données. Il s’agit donc de résoudre ce problème à partir de ces « données ». Une donnée, c’est ce qui nous est donné, c’est l’existant, c’est intangible. De ce raisonnement, tout découle.

    La richesse dont dispose le pays ? C’est une donnée. Conséquence : pour améliorer les ressources des moins riches, une seule solution est envisageable, « prendre aux riches pour donner aux pauvres ». En imaginant le total comme un gâteau à découper, c’est imparable. Sauf que le gâteau est le résultat de l’activité humaine, c’est-à-dire du travail global des hommes. Loin d’être intangible, c’est une quantité éminemment variable, un pays qui globalement travaille davantage accroît sa richesse. Il est donc efficace d’augmenter l’activité pour augmenter la richesse disponible. Et c’est le seul moyen d’y parvenir, hormis la découverte de richesses naturelles. À l’inverse, en taxant fortement « les riches » on les conduit à moins consommer et surtout à moins investir. De ce fait l’activité globale baisse, la richesse créée diminue. Et elle diminue naturellement pour tout le monde. Les entreprises, moins alimentées en commandes, travaillent moins et sous-traitent moins. Et l’emploi décroît.

    L’emploi, justement…Autre blocage du même type dans l’esprit socialiste français. Vraiment de même type : l’emploi est une donnée, il est ce qu’il est, donc la solution unique consiste à le répartir. Cela vous étonne, j’exagère, ils ne sont pas si simplets ? Eh bien n’entendez-vous jamais, ne lisez-vous jamais, des phrases telles que celles-ci :

    La France fait trop d’enfants, elle n’a pas d’emplois pour eux

    Les immigrés prennent nos emplois.

    La réduction du temps de travail va créer des embauches (slogan du PS à l’époque Aubry)

    « Notre emploi » est un bienfait, il faut le partager.

     Toutes ces expressions courantes montrent fort bien que ce concept de l’emploi, donnée figée s’est emparé des esprits français corrompus par la vision socialiste. Tout le monde, mentalement « socialisé », semble convaincu que si la population diminuait de 3 millions de personnes le chômage disparaîtrait, et que si elle augmentait d’un million, le nombre de chômeurs augmenterait d’un million. À tous ceux-là je pose la question : lorsque plus d’un million de Pieds-Noirs sont arrivés en métropole en 1962, le chômage a-t-il augmenté ? Lorsque dans ces mêmes années, les 20% de femmes travaillant à l’extérieur sont devenues 80%, le chômage a-t-il augmenté ? Non et non.

    Mitterrand, le « modèle » de l’équipe Hollande, avait simulé l’impuissance en déclarant : « contre le chômage, on a tout essayé ». Tout, sauf ce qui fonctionne : augmenter l’activité globale. Par les horaires, par la flexibilité, l’activité des uns créant du travail pour les autres…

    C’est ainsi que la double course exigée de notre économie, diminuer le chômage et augmenter le pouvoir d’achat, se trouve bloquée dans son élan. Le coureur est enchaîné, il lui manque dès le départ l’impulsion que lui donnerait l’idée que les « données » de départ peuvent être mobiles. Le gel supposé des données entraîne la glaciation de l’action.

     


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    « Les rats quittent le navire », telle est l’affirmation que l’on peut entendre ici et là depuis l’annonce du départ de la « plume » d’Emmanuel Macron...

    L’annonce, il y a quarante-huit heures, du prochain départ de Sylvain Fort, directeur de la Communication et des Relations avec la presse de l’Élysée a fait d’autant plus de bruit dans les rédactions que cet « ami de la première heure » était la « plume » du président de la République. Sylvain Fort – 300 discours durant la campagne puis dans le cadre de la mandature ! – a notamment rédigé le contenu de plusieurs interventions très remarquées d’Emmanuel Macron ; parmi elles, le discours qu’avait prononcé le chef de l’État en hommage au commandant Arnaud Beltrame, décédé lors de l’attaque terroriste du 23 mars 2018 à Trèbes, et celui que le président a adressé aux catholiques de France le 10 avril de la même année.

    Officiellement, Sylvain Fort quitte un poste qu’il juge « chronophage » pour s’orienter vers d’autres activités professionnelles et se consacrer à sa famille, ce qui est parfaitement compréhensible quand on sait à quel point tenir un rôle de premier plan dans le staff élyséen est peu compatible avec une vie familiale épanouie eu égard à la disponibilité de tous les instants qu’induit la fonction. Ce départ n’en est pas moins étonnant au moment où la Macronie, déstabilisée par les développements de l’affaire Benalla et plus encore par l’émergence du très populaire mouvement des Gilets jaunes, vacille sur ses bases et place le président en situation de gouvernance précaire.

    Si l’on en croit l’éditorialiste Michaël Darmon (Europe 1), Emmanuel Macron a très mal pris l’annonce de ce départ et tout fait pour inciter des amis communs à faire pression sur Sylvain Fort pour qu’il revienne sur sa décision. En vain ! La décision semble « irrévocable ». Un départ d’autant plus ennuyeux qu’il n’est pas le premier : d’autres conseillers moins connus ont déjà quitté l’Élysée, à l’image de Stéphane Séjourné qui reste certes en responsabilité à LREM, mais hors de la ruche présidentielle, ou de Barbara Frugier, conseillère communication à l’international.

    Il y a encore plus préoccupant pour le monarque. Au départ imminent de Sylvain Fort devrait en effet très vite s’ajouter celui d’Ismaël Emelien, « conseiller spécial » d’Emmanuel Macron et membre du « premier cercle ». Cerise amère sur le gâteau, on parle même avec de plus en plus d’insistance dans les rédactions du prochain départ de l’une des pièces maîtresses du Château : le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, que certains éditorialistes n’hésitent pas à qualifier de « clé de voûte » du système élyséen. Deux départs qui seraient liés à des ennuis judiciaires, pour le premier dans le cadre de l’affaire Benalla, pour le second en raison de possibles conflits d’intérêts avec la société MSC Cruises.

    Où s’arrêtera l’hémorragie ? Nul ne le sait. Mais le départ annoncé de Sylvain Fort et celui, probable, d’Alexis Kohler sont à l’évidence de très mauvais signaux donnés au pays alors qu’Emmanuel Macron tente de reprendre la main. On ne perd pas impunément de telles « pointures » du dispositif présidentiel sans que cela n’affecte le fonctionnement de la présidence ! Nul doute pourtant que Sylvain Fort, passionné d’opéra et auteur d’une remarquable biographie d’Herbert von Karajan devrait, dans quelques jours, pousser un soupir de soulagement en passant le portail de l’Élysée : mieux vaut fréquenter Mozart et Verdi que les crabes qui s’agitent dans le bocal de la rue du Faubourg Saint-Honoré !