•  

     

    "Mahatma Gandhi, que pensez vous de la civilisation occidentale ?" Gandhi : "je pense que ce serait une bonne idée."

    « Le temps est venu de changer de civilisation » Edgar Morin
     

    Inégalités au pluriel, renvoie aux inégalités socio-économiques. Une civilisation humaniste devrait privilégier la qualité plutôt que la quantité. Au contraire, notre économie occidentale est structurée pour faire de la croissance et des profits. Elle ne sait pas faire autrement. Cette croissance effrénée, cette recherche du profit à tout prix sont causes de pollutions, épuisement des ressources et aggravation des inégalités, … .

     
    « Le libéralisme économique préside tous les imaginaires » disait Edouard Glissant.

     
    La théorie du ruissellement, pilier du néolibéralisme et bible de nos politiciens est une contre vérité mortifère dans une économie mondialisée gangrenée par la spéculation, où l'argent est libre comme le renard dans le poulailler des contribuables et autres besogneux captifs de leurs percepteurs nationaux (*), ainsi qu'en témoignent le délabrement du monde autant que la misère du monde en ce début du troisième millénaire. Ces calamités sont soigneusement tues par les contre pouvoirs institutionnels déficients qui font de l'Occident "un royaume où les fous guident les aveugles" (Shakespeare). Rien de nouveau sous le soleil.
     

     
    L'heure est venue de dénoncer ad libitum la bêtise de ce credo idéologique, les excès du néolibéralisme tant il est vrai que le capitalisme se nourrit de ses contradictions et la trahison des médias de masse.

     
    Sur les inégalités :

     
    « Depuis la crise financière de 2008, le nombre de milliardaires dans le monde a presque doublé : ils étaient 1 125 en 2008 et 2 208 en 2018. A l’inverse, la « richesse » de la moitié la plus pauvre de la population mondiale, soit tout de même 3,8 milliards de personnes, a chuté de 11 %. Oxfam accuse les plus riches dans le monde de dissimuler 6700 milliards d’euros au fisc et affirme que la fortune globale de l’ensemble des milliardaires dans le monde a encore augmenté de 800 milliards d’euros en 2018, alors que celle de la moitié de la population la plus pauvre a diminué de 11 %. » (2)

    " Un excès qu'on veut fuir fait passer à l'excès opposé, et ce n'est qu'après avoir été d'une extrémité à l'autre que l'on revient au milieu. " Citation de Cécile Fée ; Les maximes et pensées (1832) (L'Occident fuit l'égalitarisme communiste.)

    « Pendant les décennies keynésiennes, la droite libérale a pensé l’impensable et profité d’une grande crise pour l’imposer. Dès 1949, Friedrich Hayek, le parrain intellectuel du courant qui enfanta Ronald Reagan et Mme Margaret Thatcher, lui avait en effet expliqué : « La principale leçon qu’un libéral conséquent doit tirer du succès des socialistes est que c’est leur courage d’être utopiques qui (...) rend chaque jour possible ce qui, récemment encore, semblait irréalisable. » (1) … En août 1993, le « Prix Nobel » d’économie ultralibéral Gary Becker expliquait : « Le droit du travail et la protection de l’environnement sont devenus excessifs dans la plupart des pays développés. Le libre-échange va réprimer certains de ces excès en obligeant chacun à rester concurrentiel face aux importations des pays en voie de développement. » Novembre 2008 Penser l’impensable LMD Serge Halimi (3)

    " Il est un moyen infaillible de prévenir toutes représailles redoutables : c'est de ne jamais commettre aucun excès, c'est de n'abuser jamais du pouvoir, c'est de l'exercer toujours comme si l'on devait le perdre le lendemain. " Citation de Emile de Girardin ; Les pensées et maximes (1867) (GJ : Macron a abusé du pouvoir. )

    « Ce n’est pas un hasard si la morale existe, c’est parce que des créatures éprouvent le besoin d’harmoniser la vie en société pour éviter des excès préjudiciables à la survie » (Damasio) ( Le capitalisme est amoral ; les tenants de la théorie du ruissellement sont immoraux.)

     "La seule protection contre les excès du libéralisme anglo-saxons c'est l'État français". (Alain Touraine, FI 26/6/8). ( Mais ça c'était avant : L’État macronien converti au TINA n'est plus une protection, bien au contraire. )

     
    Sur l'absence de gardes fous, la déficience du pouvoir médiatique :

    C'est Serge Halimi qui en parle le mieux. Voici quelques extraits de son ouvrage : "Les nouveaux chiens de garde" (4)

     « Il fut un temps où le grand journaliste était également grand reporter. Trop loin, trop long, trop cher. Il lisait aussi autre chose que des journaux. Il n'en a plus ni la curiosité ni le temps. Désormais, le commentaire hebdomadaire - parfois quotidien - exige de ne plus quitter son bureau que pour passer à table. » Parlant des journalistes de son pays, un syndicaliste américain a observé : " Il y a vingt ans, ils déjeunaient avec nous dans des cafés. Aujourd'hui, ils dînent avec des industriels. "

    « En ne rencontrant que des décideurs, en se dévoyant dans une société de cour et d'argent, en se transformant en machine à propagande de la pensée de marché, le journalisme s'est enfermé dans une classe et dans une caste. Il a perdu des lecteurs et son crédit. Il a précipité l'appauvrissement du débat public ...

    « Guerre du Golfe et du Kosovo, traités européens, accords de libre-échange, privatisations, mise en cause du niveau des retraites et de l'assurance sociale : sur tous ces sujets qui exigeaient une vraie confrontation des points de vue et qui engageaient l'avenir du pays, la quasi-totalité des quotidiens, des hebdomadaires, des radios, des télévisions ont, chaque fois, battu le même tambour avec les mêmes arguments. Au service de la guerre, au service de l'argent, au service du commerce.

    « La censure est (cependant) plus efficace quand elle n'a pas besoin de se dire, quand les intérets du patron miraculeusement coincident avec ceux de "l'information" Le journaliste est alors prodigieusement libre. Il est heureux. On lui octroie en plus le droit de se croire puissant ...

    « Noam Chomsky ne cesse de le répéter : l'analyse du dévoiement médiatique n'exige, dans les pays occidentaux, aucun recours à la théorie du complot. Un jour, à un étudiant américain l'interroge : "J'aimerais savoir comment au juste l'élite contrôle les médias ?" sa réponse fut : " Comment contrôle-t-elle General Motors ? La question ne se pose pas. L'élite n'a pas à contrôler General Motors. Ça lui appartient".  »

     

     

    (*) cf. la mutation de l'ISF en ISF sur l'immobilier.
     

    Notes

    (1) http://www.leparisien.fr/economie/chaque-jour-la-fortune-des-plus-riches-augmente-de-2-2-milliards-d-euros-21-01-2019-7993083.php
    (2) https://www.ledauphine.com/france-monde/2019/01/21/26-milliardaires-aussi-riches-que-la-moitie-de-l-humanite
    (3) https://www.monde-diplomatique.fr/2008/11/HALIMI/16446
    (4) https://www.babelio.com/auteur/Serge-Halimi/9298/citations?a=a&pageN=1
     

     


  •  

    Le 29 novembre dernier, le CNAFAL a rencontré Julien Lauprêtre, le Président du Secours populaire depuis 1958

    1/ Pouvez-vous nous dire ce qu'est le Secours Populaire aujourd'hui ?

    Le secours populaire a été créé en 1945, avec plus d’un million de membres, 82 000 bénévoles, l’activité est grande. Nous sommes des généralistes de la solidarité.

    Dans le domaine alimentaire, 180 millions de repas ont été distribués l’année dernière. L’accès aux soins avec le concours des médecins du Secours populaire. De grandes campagnes pour les vacances, avec nos Journées des Oubliés pendant le 15 août. Donc, une grande activité dans tous les domaines et au niveau international.

    Nous avons créé le mouvement « enfants copains du monde » qui rencontre un grand succès. Afin que les enfants apprennent à s'aimer plutôt qu’à s’entretuer, à se rassembler plutôt qu’à se fuir.

    Cette année, nous avons ouvert 31 villages enfants-copains du monde, 18 en France et 13 à l'étranger.

    Le principe est de regrouper des enfants de toutes nationalités. Cette année, les enfants de 50 pays étaient réunis. Ces séjours permettent aux enfants de mieux se connaître et trouver des idées pour développer la solidarité. Ces structures s'appelaient initialement des villages enfants copains du monde vacances. Suite au récit dramatique d'un enfant, ce terme a été supprimé.

    Ainsi, la structure du Bénin récolte de l'argent pour acheter des poubelles pour les hôpitaux de leur région. Des enfants philippins ont, quant à eux, décidés de créer un groupe de musique pour apporter de l'argent à leur association.

    Les enfants font fi des appartenances religieuses.

    Au niveau international, nous avons une multitude de partenaires qui nous permettent d'être plus efficaces et réactifs, en cas de catastrophe naturelle, par exemple.

    Notre idée est de mondialiser la solidarité.

    2/ Quelle est selon vous la réalité de la pauvreté ? On parle de plus en plus de la grande pauvreté…

    Je confirme qu'elle gagne du terrain dans toutes les régions. Dans toute la France, nos bénévoles sont sur le terrain. Les personnes âgées font de plus en plus souvent appel à notre banque alimentaire ainsi que les familles monoparentales. On note aussi une augmentation de jeunes. Nous avons créé un réseau de solidari-bus qui se déplace sur les campus universitaires pour apporter de quoi se nourrir aux étudiants. Un phénomène nouveau aussi, des personnes de la classe moyenne se trouvent à venir au secours populaire suite à un accident de la vie.

    Trois millions de personnes ont sollicité l'aide du SPF, en 2017.

    Il y a de plus en plus de misère cachée.

    Le SPF demande une participation minime afin que les "demandeurs" ne se sentent pas dans une situation d'assisté.

    La montée des idées racistes est très préoccupante pour le SPF.

    Le Secours populaire déplore que les exemples d’actes positifs ne soient pas plus mis en lumière.

    Pour l'alimentation, le SPF est en partenariat avec des restaurateurs et des boulangers qui font des actions pour la pauvreté. Le SPF a soumis une idée pour que les boulangers, pendant l’épiphanie, vendent leurs galettes au bénéfice du Secours populaire.

    Les bénévoles sont de plus en plus nombreux. Une des priorités est de fonder un mouvement européen. Pour cela, un colloque a été organisé à Bruxelles. Avec 400 jeunes européens.

    Le Secours populaire revendique sa totale indépendance au niveau politique, quel que soit le pouvoir en place. L’idée est d’aiguillonner les pouvoirs publics.

    Ainsi, nous avons réussi à sensibiliser le Président de la République sur le problème des enfants qui ne partent jamais en vacances. Des enfants ont été reçus à l’Elysée, suite à cette initiative.

    Nous sommes l’avocat des pauvres.

    50 000 enfants sont partis en vacances avec le SPF. Grâce à lui, certains enfants ont vu la mer ou bien la Tour Eiffel pour la première fois.

    3/ Au niveau national et départemental, nous avions lors de nos permanences de surendettement beaucoup de personnes endettées par le crédit il y a 5, six ans. Désormais, on constate que les personnes qui viennent sont pauvres.

    Oui, nous faisons le même constat, et nous aidons aussi les personnes qui ont eu des coupures d’électricité. On travaille aussi sur l’éducation populaire, aider les gens à s’en sortir pour user de leurs talents : avec des ateliers cuisine, …

    4/ Les majeurs qui sortent de l'ASE ne sont plus pris en charge et dorment dans le rue avec les risques qui sont liés. Une proposition de loi est en cours, mais pour l’instant que faire ?

    Des mesurettes sont prises. Ces jeunes sont dans des situations dramatiques. Il faut faire jouer la solidarité. Nous sommes présents dans des campus universitaires. Nous sommes partenaires avec la Fédération des Maisons des lycéens.

    Début décembre, des jeunes de cette Fédération, déguisés en père noël verts, sont allés au Parlement Européen pour alerter les membres du Parlement Européen sur le maintien de l’aide alimentaire, en faisant semblant de manger dans une assiette vide.

    Nous invitons les jeunes à venir nous voir pour trouver conjointement des solutions.

    5/ Dans nos associations, nous avons un véritable réseau entre associations mais comment se faire reconnaître par les institutionnels ?

    C'est une bataille continue pour le rôle et la place des associations humanitaires dans la société. Elles ont un rôle fort et ont un besoin de soutien et d’écoute, sans que l’on touche à leur indépendance.

    Le bénévolene peut pas prendre du repos durant les vacances. Il faut s'organiser pour que les structures soient ouvertes 24h/24h.

    6/ Parlons gilets jaunes, beaucoup de personnes des classes moyennes se soulèvent, et si les pauvres s’y mettaient ?

    Avec les gilets jaunes, on sent à travers les témoignages que la misère grandit et de nombreuses personnes disent désormais qu'elles sont forcées d’aller au Secours populaire. C’est le reflet d'une précarité montante.