Son nom ? « Ça dépend. Le terrien ou l’extraterrestre ? », demande le prévenu qui se présente comme « un serviteur d’Allah », « moudjahidine de l’espace », milliardaire, propriétaire d’un palais sur Saturne. Avec patience mais fermeté, Marc Fritsch, le président du tribunal correctionnel de Bordeaux le fait redescendre sur Terre.
L’homme, détenu quadragénaire dont la sortie du centre pénitentiaire de Gradignan est prévue pour le mois de juin, est jugé pour une série d’incidents survenus en prison, entre fin mars et début avril 2024. Des coups de pied dans la tête et dans le ventre lors d’une fouille, des menaces et insultes, et même des crachats à l’occasion de soins ou de repas.
Il n’écoute pas le résumé des faits. « Pas besoin, je l’ai vécu. » Un peu plus tôt, dans les geôles du palais, il s’est dévêtu. Dans le box, il s’étire, fait des pompes, puis des tractions, boit, se promène, saisit la mousse du micro et chante. « Vous ne voulez pas un concert à la place ? » « Le tribunal n’est pas une salle de spectacle », rétorque le président.
La peur au ventre
Le prévenu se justifie. Sur les violences : « J’avais fumé mes draps. Ils m’ont donné des ordres. Ils voulaient me toucher pour la fouille, je me suis débattu. » Les crachats : « Je dois prendre mon médicament le matin, elle est venue à midi ! » Ou : « J’ai droit à la douche et la cabine téléphonique et ils ne me les donnent pas. Je suis dans mon droit parce que je suis dans une zone de non-droit. » « Je suis dans un engrenage, j’arrive plus à m’arrêter », confesse-t-il. L’expert psychiatre qui l’a rencontré conclut à une altération du discernement et se montre pessimiste pour la suite.