• Claire et Cédric, producteurs d’asperges et viticulteurs en Gironde : « on se débrouille mais il faut faire des choix »

    Claire et Cédric, producteurs d’asperges et viticulteurs en Gironde : « on se débrouille mais il faut faire des choix »

    Claire et Cédric, producteurs d’asperges et viticulteurs en Gironde : « on se débrouille mais il faut faire des choix »

     

    À Saint-Christoly-de-Blaye, Claire et Cédric Arino mènent de front la culture de l’asperge et la viticulture. Tous deux en reconversion professionnelle, ils assument leur choix et entendent bien franchir le cap de la crise actuelle

    Cinq hectares d’asperges et 40 hectares de vignes. Ce sont les deux productions que mènent Claire et Cédric Arino sur l’EARL (exploitation agricole à responsabilité limitée) de La Vergnée, nichée dans la commune de Saint-Christoly-de-Blaye, en Haute Gironde. Claire a pris la succession de ses parents, sa mère étant partie à la retraite en 2022. « Ils ont produit de l’asperge pendant trente-six ans », raconte l’agricultrice. Elle est revenue sur l’exploitation en 2017, en reconversion professionnelle, après avoir travaillé comme assistante commerciale puis occupé un poste de gestion dans le négoce du vin.

    Son mari, Cédric, fils de viticulteur, l’a rejointe en 2022, lui aussi en reconversion. « J’étais conseiller en matériel agricole. J’ai même vendu son dernier tracteur à la mère de Claire », sourit-il. Les asperges produites sous l’appellation Asperges du Blayais IGP (Indication géographique protégée) sont écoulées en vente directe, soit sur différents marchés en Gironde et Dordogne, soit à la ferme. La production viticole, en Côtes de Blaye et Bordeaux, est, elle, directement acheminée vers la coopérative de Tutiac. Et si la surface consacrée au légume est bien moindre que celle plantée de vignes, « c’est l’asperge qui rapporte le plus », admet le couple.

     

    Dans quel état d’esprit êtes-vous en pleine crise agricole ?

    Claire et Cédric. Cette crise, on la ressent depuis déjà un an. Tout augmente, les taux bancaires, le matériel, la main-d’œuvre et on ne vend pas plus cher. Il y a aussi une crise de la consommation. Alors on fait des économies pour passer le cap, on ne programme pas d’investissements, on réduit la main-d’œuvre au maximum, sur quatre mois (récolte des asperges et vendanges), le reste, on le fait à deux. On n’est pas sereins, on sort d’une année compliquée mais on garde espoir. On a 40 ans et on espère tenir le coup. Nous n’avons pas participé aux manifestations mais nous sommes solidaires avec le mouvement. Cédric. Le vin se casse la figure et nous avons subi trois années d’aléas climatiques. S’il faut arracher les vignes, on le fera. Il nous restera les asperges qui amènent un chiffre d’affaires supérieur.

    Comment votre quotidien s’organise-t-il ?

    Cédric. On fait le maximum d’heures tant qu’il fait jour. Je peux même pousser un peu plus, quand je taille la vigne par exemple et qu’il ne reste que quelques pieds, pour repartir sur autre chose le lendemain. On travaille presque sept jours sur sept avec des moments plus intenses, quand c’est la période des asperges notamment. Mais on ne compte pas les heures. Nous avons deux jeunes enfants, ils vont à la garderie matin et soir en période scolaire et au centre de loisirs pendant les vacances. Claire. En période des asperges, je me lève à 3 heures du matin pour aller faire les marchés. Puis je reviens continuer ma journée à l’exploitation. Je m’occupe aussi de la comptabilité et de l’administratif. Claire et Cédric. Le soir, on dort bien mais on refait aussi la journée. En fait, on ne décroche jamais vraiment, même en vacances.

    Arrivez-vous à vivre de votre métier ? Quel revenu moyen vous versez-vous ?

    Claire et Cédric. Comme nous sommes associés dans une société, c’est plus une rémunération qu’un salaire, on arrive à se dégager 1 300 euros par mois chacun. Encore une fois, nous essayons de faire le maximum d’économies. Sur 2022 et 2023, nous avons réussi à baisser les charges de l’entreprise de 100 000 euros. Nous avons aussi négocié un découvert de 10 000 euros avec la banque. Après, est-ce que l’on vit de notre métier ? Non. On ne peut pas faire de projets. Nous avons la chance d’habiter sur l’exploitation, mais si on voulait déménager, ce ne serait pas possible, on ne peut pas sortir d’argent, même chose pour construire un nouveau hangar. On se débrouille mais il faut faire des choix, pour le matériel ou, par exemple, l’habillement des enfants qui est essentiellement de la seconde main.

    Quand êtes-vous partis en vacances pour la dernière fois ?

    Cédric. C’était aux vacances de la Toussaint. Nous avons passé trois jours au Puy du Fou. On essaie de partir chaque année à cette période et une semaine en été, généralement avant le 15 août. Mais nous ne faisons pas de folies, on va en camping et on essaie surtout de faire des activités gratuites. Claire. C’est un moment nécessaire, on ne peut pas tout le temps penser à la culture.

    Quel temps l’administratif prend-il dans votre organisation ?

    Claire. Beaucoup trop de temps (rire). Être agriculteur, ce n’est seulement le travail de la terre. Il faut aussi savoir gérer l’administratif, être DRH et savoir recruter les gens, être technicien et également comptable ; c’est plusieurs personnes en une seule. On doit remplir des cases mais il n’y a personne derrière, les gens ne sont pas avec nous au quotidien. Cédric. Les contraintes administratives nous ont fait évoluer dans notre façon de travailler. Je note tout au fur et à mesure. Je m’organise pour avoir tous les documents en temps et en heure pour que l’on n’ait pas à nous les redemander ensuite. On est obligés de constamment anticiper. Et puis il y a des injonctions contradictoires, des aberrations ; pour la MSA, je ne suis pas viticulteur puisque les asperges rapportent plus. Et c’est pire avec la PAC : on nous demande, par exemple, de ne pas tailler les haies à certaines périodes, mais nous, on va dans les champs quand on peut. On ne va pas y aller quand la terre est gorgée d’eau et que l’on risque d’embourber le matériel. Quant aux aides, on ne sait jamais si on va les avoir, en revanche, nous sommes toujours là pour payer.

    Comment voyez-vous l’avenir ?

    Cédric. On aime toujours se lever le matin pour aller travailler même si nos projets sont en stand-by. S’il le faut, on réduira la voilure. Les asperges, c’est deux mois dans l’année et ça apporte une plus-value. Pour la vigne, on ne maîtrise rien. Mais aujourd’hui, je ne me vois pas faire autre chose. Notre avenir passe par l’exploitation. Claire. Si vraiment on n’a pas le choix, je serai capable d’aller travailler ailleurs mais je n’en ai vraiment pas envie. Et si nos enfants veulent reprendre plus tard, je leur dirai comme ma mère : faites des études et allez voir ailleurs d’abord.

     

     

     

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