-
Comment gérer des adolescents qui fument du cannabis
Comment gérer des adolescents qui fument du cannabis
Les Français consomment de plus en plus jeunes. Or le cannabis perturbe le processus de maturation du cerveau et peut provoquer des difficultés scolaires.
En vérifiant le contenu des poches du pantalon de son fils qu’elle s’apprêtait à enfourner dans le lave-linge, Marie a trouvé un petit sachet en plastique avec un reste d’herbe. Elle avoue être tombée des nues. «Je ne suis pas naïve. Je sais que les joints circulent dans les soirées des adolescents. Moi-même, lorsque j’étais à la faculté, j’en ai fumé quelques-uns. Mais Arthur vient seulement d’avoir 15 ans…»
Marie a fait la découverte brutale d’une réalité statistique: les Français sont les plus jeunes consommateurs de cannabis en Europe. Ainsi, entre 15 et 16 ans, près d’un jeune sur trois en a déjà consommé au moins une fois, comme le rappelait en juillet l’observatoire européen des drogues et des toxicomanies. À 17 ans, ils sont 42 %… «À cette époque de la vie, avec l’alcool ou le cannabis, ils font la première expérience d’une substance chimique qui modifie leur état de conscience et leurs sensations. La majorité des jeunes utilisent ces substances de façon récréative, même si certains d’entre eux s’en servent pour soigner des souffrances de l’enfance», explique Jean-Pierre Couteron, président de la Fédération addiction et coauteur de Adolescents et cannabis. Que faire? à paraître en octobre 2017 aux Éditions Dunod.
«La majorité des jeunes utilisent ces substances de façon récréative, même si certains d’entre eux s’en servent pour soigner des souffrances de l’enfance »
Alors que nos adolescents connaissent bien les effets néfastes de l’alcool, ils sous-estiment ceux du cannabis, qu’ils jugent plus sûr. Or l’usage du cannabis est loin d’être anodin. Tout d’abord, contrairement à une certaine mythologie, le cannabis va avoir un impact sur le corps. Fumer régulièrement va entraîner des épisodes plus fréquents de bronchite chronique et des symptômes respiratoires plus sévères. Il semble également impliqué dans la survenue d’accidents vasculaires cérébraux chez des adultes jeunes. Mais chez les ados, les effets délétères du cannabis vont affecter en tout premier lieu les neurones.
Influence sur le quotient intellectuel
«À l’adolescence, le cerveau est encore en pleine maturation. Le cannabis va perturber ce processus avec le risque d’effets persistants à long terme», souligne le professeur Marie-Odile Krebs, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne, à Paris. Connu pour diminuer la mémoire de travail, entraîner des troubles de l’attention et des fonctions exécutives (planification, capacité d’établir des priorités, flexibilité mentale, résolution de problèmes, capacités créatrices), le cannabis va avoir des répercussions sur les résultats scolaires. C’est ce qu’a démontré une étude de l’Inserm menée sur une cohorte de 1000 personnes et publiée en mai dernier. «Nos résultats ont montré que la consommation de cannabis avant 17 ans peut aggraver ou induire des difficultés scolaires se traduisant à terme par un niveau d’études inférieur chez ces jeunes», affirme Maria Melchior, coauteur de l’étude. Et ce, indépendamment du milieu social considéré et des difficultés psychologiques ou scolaires des jeunes.
«À l’adolescence, le cerveau est encore en pleine maturation. Le cannabis va perturber ce processus avec le risque d’effets persistants à long terme»
Ces résultats confortent ceux d’une étude néo-zélandaise datant de 2012 qui montraient que commencer à fumer avant 18 ans et continuer pendant des années influaient sur le quotient intellectuel. Il en ressortait que les consommateurs les plus réguliers qui avaient commencé très jeunes avaient jusqu’à huit points de QI en moins !
Plus inquiétant, le cannabis peut également précipiter l’apparition de troubles psychiatriques tels que dépression, troubles anxieux voire troubles psychotiques. «Sans que l’on sache aujourd’hui déterminer qui sont les plus vulnérables. D’autant que pour le cannabis, comme pour l’alcool, il existe une grande variabilité individuelle», met en garde Marie-Odile Krebs. En clair, certains peuvent fumer sans modération sans qu’il leur arrive rien, contrairement à d’autres qui vont réagir à des quantités minimes. «Ce message doit passer auprès des jeunes», insiste Marie-Odile Krebs.
«Il faut trouver le point d’équilibre entre: ne pas retarder le moment où l’on réagit et lui renvoyer de telles angoisses ou préjugés que l’enfant cache tout»
Quant aux parents, conscients des risques, ils peuvent, comme Marie, ne pas imaginer l’âge des premières consommations. «Or à 13, 14, 15 ans, lorsque les enfants commencent à faire des choses seuls, cela les expose aux autres. C’est à ce moment qu’ils vont rencontrer le tabac, l’alcool, le cannabis. À cet âge, je dis aux parents: accompagnez-les. Soyez là, lorsqu’ils rentrent d’une soirée. Cela vous permet de vérifier dans quel état ils sont lorsqu’ils rentrent», souligne Jean-Pierre Couteron. Ensuite, poursuit le spécialiste, il n’est jamais trop tôt pour réagir. «Il faut trouver le point d’équilibre entre: ne pas retarder le moment où l’on réagit et lui renvoyer de telles angoisses ou préjugés que l’enfant cache tout.»
Une consultation chez le médecin traitant ou dans une «consultation jeunes consommateurs» (des rendez-vous mis en place dans presque tous les départements français) peut permettre de dédramatiser. Pour toute information, le numéro «Drogues info service», 0800 23 13 13, est gratuit depuis un poste fixe.
« Il manque 484 euros par mois aux Français pour être à l'aiseBordeaux 360°à vélo entre le voitures qui stationnent sur les pistes cyclables »