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Internet est de plus en plus souvent une décharge où d'aucuns viennent y vidanger leur trop-plein de haine,
Internet est de plus en plus souvent une décharge où d'aucuns viennent y vidanger leur trop-plein de haine, c'est d'autant plus vrai pour les thuriféraires d'idéologies extrêmes qui l'utilisent comme une tribune de calomnies, un dégueuloir à ciel ouvert. On aurait toutefois tort d'attribuer ces vomissures fachosphériques à la seule volonté catharsitique d'une extrême-droite débordant de rancune et désireuse de l'évacuer, ce serait leur donner une justification psychologique qu'ils ne méritent guère. Derrière ce dégueulis de haine et de fakes se cache en fait une réelle volonté politique de nuire et de manipuler l'opinion publique hélas crédule.
Or, dans notre très vertueuse société, les deux accusations capables de réduire quelqu'un en cendres sont les accusations de corruption et de pédophilie. Si la première ne peut s'appliquer qu'à des personnalités publiques, la seconde, implacable, est un couperet capable de couper n'importe quelle tête. Celle qui en fait actuellement les frais, après Jack Lang, Daniel Cohn-Bendit et Frédéric Mitterrand, c'est Brigitte Macron, la première dame de la République.
Irrités, surpris ou attendris, personne ne reste insensible à l'atypique histoire d'amour entre Emmanuel Macron et sa professeure de français, Brigitte Trogneux. Une histoire d'amour commencée en 1993, alors que le futur Président de la septième puissance mondiale n'était qu'un jeune homme de seize ans, en classe de première au lycée de la Providence à Amiens. Brigitte Auzière-Trogneux, enseignante de lettres et animatrice d'un atelier théâtre était alors âgée de trente-neuf ans et mère de trois enfants. Petite anecdote : les Trogneux étaient une riche famille de chocolatiers picards très réputés pour leurs macarons !
Une relation qui fit scandale dans la bonne société amiénoise mais qui triompha néanmoins des mauvaises langues en se poursuivant à Paris où Emmanuel Macron partit étudier. Une relation qui finit par le mariage des deux tourtereaux en octobre 2007. Pour l'extreme-droite, il s'agit de pédophilie et certains vont jusqu'à réclamer que la première dame soit traduite en justice vingt-cinq ans après les faits (l'argument le plus putride d'un blogueur maurrassien : "on traque bien des papys jusque sur leur lit de mort pour de supposées actions datant de la guerre"…).
De fait, selon les lois en vigueur en 1993, la relation entre Brigitte Trogneux et son élève pouvait effectivement tomber sous le coup de la loi du 2 mai 1980 rendant passible d'amende (et de radiation) les relations sexuelles entre un enseignant et son élève sans distinction d'âge. En effet, même si la majorité sexuelle était fixée à quinze ans, la loi considérait que, quel que soit l'âge de l'élève, le professeur était détenteur d'une autorité et qu'une relation sexuelle résultait forcément d'une pression. On est bien là dans le droit français hérité du jusnaturalisme de l'Inquisition. Cependant, ni Emmanuel Macron ni sa famille n'ont alors porté plainte, et rien ne garantit que Mme. Trogneux ait eu une relation sexuelle avant la majorité de son présidentiel élève. En effet, la loi du 2 mai 1980 ne s'applique qu'aux relations sexuelles (pénétration vaginale, anale, orale, attouchements) mais les relations platoniques ne tombent pas sous le coup de cette loi. Or, il est parfaitement impossible de prouver la nature des relations entretenues par le couple avant la majorité d'Emmanuel Macron intervenue à son 18ème anniversaire le 21 décembre 1995.
Même dans le cas où les deux auraient eu une relation charnelle, cela ne pourrait en aucun cas relever de la pédophilie, le jeune Emmanuel ayant alors franchi la barre fatidique des quinze ans. Et, quoi qu'il en soit, seule la victime et sa famille sont à même de considérer le caractère prédatif ou non d'une relation. Or, il y a peu de victimes qui épousent leur agresseur ! En outre, la propre mère d'Emmanuel Macron, après moult réticences, a accepté la relation de son fils et est même devenue la meilleure amie de sa bru. Enfin, si ces accusations ne tiennent ni moralement, ni juridiquement, elles ne tiennent guère plus sur un plan politique et logique : ceux qui accusent Mme. Trogneux d'avoir "manipulé" son élève en le séduisant sont les mêmes à accuser le président Macron d'être un "manipulateur" et un "gourou". Il faut choisir, messieurs : manipulateur ou manipulé, prédateur ou proie…
Au-delà du cas Brigitte Macron, il est intéressant de noter la promptitude de l'extrême-droite à employer l'accusation de pédophilie envers ses adversaires et les proches de ces derniers. Les mêmes calomnies avaient jadis sali le nom de Daniel Cohn-Bendit, Jack Lang, Frédéric Mitterrand, Christian Iacono… La soralo-dieudosphère parle d'ailleurs souvent de "réseaux pédo-sataniques" et d'enfants enlevés par les franc-maçons pour servir d'esclaves sexuels lors de rituels… Quiconque connaît un tant soit peu l'ordre maçonnique balaiera d'un revers de main toutes ces calomnies. Il est cependant intéressant de noter que ces néofascistes reprennent exactement le vocable du régime de Vichy et de la presse antirépublicaine de l'entre-deux-guerres qui s'inspire elle-même des discours médiévaux fanatiques sur les sacrifices d'enfants par les Juifs. Nombre de pogroms ont ensanglanté l'Europe au cours du Moyen-âge suite à de telles accusations proférées par le clergé. Dans certaines régions d'Europe Centrale, il suffisait qu'un enfant disparaisse, se noie ou meure simplement de maladie pour que l'on y voie la main des Juifs, surtout si la date de la mort se rapprochait d'une fête juive. Même en 2018, ce genre de rumeurs existent encore en Russie : lors de l'incendie qui coûta la vie à plus de soixante enfants dans un centre commercial russe au mois de mars, la presse russe d'extrême-droite a ravivé ces accusation antisémites que l'on croyait tombées dans les oubliettes de l'histoire.
Un enfant, innocent par nature et image vivante de l'humanité, quoi de mieux dans notre société chrétienne pour soulever les masses ? C'est en effet dans le christianisme et la sacralisation de l'enfant que cette pédo-paranoïa puise ses origines. Comme nous l'avons démontré dans le paragraphe précédent, la pédophilie a toujours été le chiffon rouge des gardiens de la morale pour agiter les foules occidentales et les dresser tour à tour contre les Juifs, les franc-maçons et à présent la gauche ou les musulmans. De fait, il s'agit là du dernier tabou d'une société prétendue sans tabous et pseudo-laïque. Bien que le puritanisme psychologique (préservation de l'intégrité psychique de l'enfant) ait remplacé le puritanisme religieux, les deux procèdent de la même logique.
L'accusation de pédophilie n'est d'ailleurs pas l'apanage de l'extrême-droite, elle est souvent utilisée par les anticléricaux les plus véhéments pour assimiler l'ensemble du clergé catholique à des satyres. S'il est indéniable que nombre d'ecclésiastiques ont un réel problème avec leur zigouigoui, ce serait pure calomnie d'entacher l'ensemble des ministres spirituels. Or, là encore, le but est de créer l'émotion dans la plèbe afin de lui faire passer un message politique. Comme le dit un sociologue états-unien, "l'accusation de pédophilie, c'est le point Godwin transposé à la sexualité". Si c'est le cas en France, ça l'est plus encore outre-Atlantique où parfois adresser la parole (ou même sourire) à un enfant inconnu est mal vu. Ainsi, dans cette morale néo-puritaine, l'enfance doit être considérée comme un monde à part qu'il faut à tout prix séparer avec un rideau de fer du monde des adultes afin qu'il n'en soit pas souillé. On peut se demander s'il s'agit d'une réelle volonté de préserver l'intégrité de l'enfant ou si les concepteurs de cette morale néo-puritaine ne cherchent pas à combler les fêlures de leur propre enfance, à moins que ce ne soit un moyen de refouler des fantasmes inavoués… On ne saurait que trop leur conseiller la lecture de Philippe Ariès et son Invention de l'enfance.
Le maccarthysme est tel outre-Atlantique que les sociologues ont forgé le terme de "pédo-paranoïa" pour décrire l'état phobique de la société. Même Anonymous s'y est mis : dès 2015, le collectif de hackers avait rendu publiques l'identité et l'adresse de milliers de personnes qu'ils accusaient (sur quelles preuves ?) de pédophilie. Sociologiquement, l'auto-justice est d'ailleurs la suite logique de la paranoïa. Cette paranoïa est entre autres alimentée par la presse chrétienne et l'alt-right. Les USA sont un vieux pays infantiliste : c'est sur la base de témoignages enfantins qu'ont débuté en 1691, soit avant même la création des USA, les procès de Salem aboutissant à l'exécution de vingt-deux personnes.
Paradoxalement, les grands gagnants de cette hystérie pédoparanoïaque sont les pédophiles (les vrais). En effet, d'après les statistiques aussi bien françaises qu'états-uniennes, les actes d'abus envers les enfants ne semblent guère diminuer au fil des années, bien au contraire. A croire que les prédateurs sexuels ont profité de cette phobie sociale pour affiner leur modus operandi et continuer à commettre leurs exactions en toute impunité.
« Bolloré les piranahs canal+orange-dailymotion etc... les garguantuas du cac/40Vous y pensez à vos employés ? Vous devriez bien leur offrir un bol d’air frais de temps à autres, les plonger dans un bain de nature, »