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Bordeaux : entre le cinéma Utopia et François Ruffin, un gros coup de froid
Le documentaire du député de la Somme, « Au boulot ! », en salle ce mercredi 6 novembre, ne sera pas montré dans le cinéma bordelais, au regret de son coréalisateur Gilles Perret
Il y a, dans la programmation de l’Utopia de ce mois de novembre, un absent remarqué : pas de François Ruffin à l’affiche ces prochaines semaines. Le nouveau documentaire du député de la Somme, « Au boulot ! », qui sort ce mercredi 6 novembre, ne sera pas montré dans le QG bordelais de la cinéphilie. Un choix surprenant, le cinéma étant connu pour ses engagements à gauche. L’ex-Insoumis semblait jouer à domicile quand il y présentait ses films, devant des salles bondées.
« Incompréhension »
« Je ne comprends pas… » regrette Gilles Perret, coréalisateur de « Au boulot ! ». « Je suis venu à l’Utopia au moins une dizaine de fois pour mes précédents films. Ils y ont tous été projetés. Il me semblait que nous étions liés par une relation de fidélité. Je connais le public de l’Utopia, je suis certain qu’il y a une appétence pour ce documentaire. »
François Aymé, directeur du cinéma Jean-Eustache à Pessac qui, lui, propose le film dès ce mercredi, note : « Ce documentaire politique, social, en prise avec le réel, paraît correspondre pleinement à l’identité de l’Utopia. J’ai été surpris qu’il n’y soit pas retenu. Il se peut que l’équipe du cinéma n’ait pas été convaincue par ‘‘Au boulot !’’, mais il y a aussi les attentes supposées du public de l’établissement. » François Ruffin et Gilles Perret ont du reste été reçus le 31 octobre au Jean-Eustache. Affluence record : 600 personnes.
« La seule chose qui a changé par rapport à nos précédents longs-métrages, c’est que François (Ruffin) s’est éloigné des Insoumis », observe Gilles Perret. Il se demande si cette non-programmation ne répond pas à un choix politique. Se peut-il que l’Utopia fasse « payer » au député ses propos peu amènes envers Jean-Luc Mélenchon et ses camarades ? Que la guerre des gauches, entre la social-démocratie, dont François Ruffin se réclame à présent, et une gauche plus « radicale », sévisse jusque dans la programmation d’un cinéma ?
« Mitigés »
Vincent Erlenbach, gérant de l’Utopia, réfute catégoriquement cette grille de lecture. « Ce film nous a été montré tard. Or, nous étions déjà engagés sur d’autres longs-métrages auxquels nous adhérons plus fortement, comme ‘‘Trois amies’’ ou ‘‘The Substance’’. Sur ‘‘Au boulot !’’, nous sommes plus mitigés. Il y a des portraits intéressants, mais le procédé, qui consiste à suivre une icône de la ‘‘trash TV’’ [Sarah Saldmann, NDLR], et à reprendre les codes de cette télévision, nous laisse perplexes. La séquence finale, quand François Ruffin, pour honorer les personnes précaires, les fait défiler en tenue de soirée sur un tapis rouge, interroge. » Il estime par ailleurs qu’« Au boulot ! », montré dans 130 salles en France, ne vise pas « une cible art et essai », mais un public plus large, comme l’affirment en effet les distributeurs.On découvre, au détour de cette explication, qu’entre François Ruffin et l’Utopia, la lune de miel n’a jamais été sans mélange. « Nous avons le souvenir de soirées formidables avec lui, note Vincent Erlenbach. Mais nous avons aussi eu, souvent, des questionnements sur certains aspects de ses films, très personnalisés. »
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