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À Bordeaux, les commerçants des Salinières en colère face aux conditions de vente : « La situation n’a jamais été aussi dramatique »
À Bordeaux, les commerçants des Salinières en colère face aux conditions de vente : « La situation n’a jamais été aussi dramatique »
Vendeurs à la sauvette, tensions croissantes et absence de dialogue… Les commerçants des marchés du parking des Salinières de Bordeaux expriment leurs mécontentements face à des conditions de travail dégradées et au silence de la mairie, qui leur promet pourtant des solutions
Après le passage de la police municipale à vélo dans les allées, les vendeurs à la sauvette déballent en hâte la marchandise qu’ils viennent de cacher dans leurs sacs. Une scène habituelle au marché Neuf sur les quais de Bordeaux ce lundi 28 octobre, où les étals et barnums des commerçants sont installés depuis le petit matin. « La situation n’a jamais été aussi dramatique », résume Christine Pénicaut, secrétaire générale du Syndicat des commerçants non-sédentaires du Sud-Ouest (SCNSSO).
Depuis le mois d’avril 2022, le marché Neuf (vêtements et bazar), le lundi, et le marché Royal (tissus), le samedi, ont été déplacés sur le parking de l’esplanade des Salinières, au moins jusqu’en décembre 2025, le temps de la rénovation de la flèche de Saint-Michel. Ce nouvel emplacement, qui leur vaut le surnom des « marchés des Salinières », est devenu lieu de discorde en raison de la gestion du marché, ou encore de la cohabitation entre les commerçants non sédentaires et les vendeurs à la sauvette.
« Les commerçants ont peur »
Aux extrémités du parking, ils sont une vingtaine à déballer quelques denrées alimentaires, bijoux ou chaussures à des prix imbattables. Une vente illégale qui s’organise à même le sol et attire un attroupement d’acheteurs. Face à eux, côté pont de pierre, le stand de Rachida est vide. La vendeuse de tissus en est certaine, leur présence a une incidence directe sur ses ventes : « Plus personne ne s’arrête, même les clients venus acheter du tissu ne résistent pas à des occasions pareilles. »
« Il y avait un torrent d’eau dans mon stand, c’était une rivière »
« Au voleur ! » hurle Bernard, un peu plus bas dans l’allée, face à un jeune homme qu’il semble avoir surpris en plein vol sur son étalage de parfums. « Si je ne l’avais pas vu, il serait allé le vendre à la sauvette », pose avec conviction le commerçant. Dans un contexte où les questions de sécurité sont remises sur le devant de la scène dans le quartier Saint-Michel, le SCNSSO réclame une présence policière constante sur le marché. Pour la représentante syndicale, il faut résoudre ces problèmes de cohabitation, car « les commerçants ont peur ».
Saïda a d’autres inquiétudes, comme il y a quelques jours lors d’une journée pluvieuse : « Il y avait un torrent d’eau dans mon stand, c’était une rivière. » En temps de pluie, l’eau s’écoule sur le sol goudronné du parking. « Il y a de la flotte partout ! Sans oublier le sol accidentogène au possible, résume Christine Pénicaut en désignant un trou dans le goudron. À chaque marché, quelqu’un se prend le pied dedans. » À cela, s’ajoutent l’absence de toilettes publiques sur le marché – « je suis obligée d’aller dans un café pour me soulager », confie Saïda – et les tensions entre les commerçants et les placiers au sujet de l’attribution des places.
Main dans la main
« Les commerçants travaillent dans des conditions ahurissantes. On en vient à se demander si la mairie cherche à les dégoûter pour fermer le marché », dénonce la responsable syndicale. Des demandes de rendez-vous auraient été formulées de la part du syndicat, sans suite. « On ne nous écoute pas. » La faute à une « méconnaissance profonde de la profession » ?
Sandrine Jacotot a pour projet de créer un marché des biffins dans le but d’intégrer les vendeurs à la sauvette qui le souhaitent.
Claude Petit / SOPourtant, dans un courrier envoyé cette semaine à l’ensemble des commerçants des marchés de Bordeaux, l’élue chargée des commerces, des marchés et des animations de proximité appelle à la création d’une association de commerçants pour chaque marché : « Le vrai travail doit se faire tous ensemble, main dans la main », indique Sandrine Jacotot. Contactée par « Sud Ouest », l’élue se dit « consciente des difficultés engendrées par les vendeurs à la sauvette » sur les marchés Neuf et Royal. Elle assure déployer « beaucoup de travail, pas toujours visible » à la recherche d’une solution durable, comme le projet de création d’un « marché de biffins ». La présence policière serait, elle, temporaire. Sandrine Jacotot appelle à un climat de « respect » entre placiers et commerçants et assure que des réunions régulières sont organisées avec les syndicats. Un nouveau règlement des marchés devrait voir le jour courant 2025.
Création d’un marché des biffins
En septembre 2021, la Ville de Bordeaux se serait rapprochée de la mairie du 18e arrondissement de Paris, à l’origine de la création du « Carré des Biffins », un marché destiné à la vente de biens de récupération. Sandrine Jacotot se dit prête à déployer la création d’un marché similaire à Bordeaux, permettant aux vendeurs à la sauvette de vendre légalement leurs marchandises. Un projet pour le moment en suspens, le temps d’identifier une association en capacité d’accompagner cette population.« « Ça fait mal au cœur, y’en a marre » : six nouvelles brebis tuées en Gironde, le loup soupçonnéDes bonbonnes de cocaïne cachées dans le slip, il insulte des agents de la sûreté ferroviaire dans la gare de Bordeaux »