Pistolets automatiques de différents calibres, revolvers de différentes marques, armes longues, carabines, fusils à pompe, mitrailleurs ou d’assaut de type M16 et Kalachnikov, lance-roquettes… Pas des répliques factices mais des armes à feu bien réelles, pour certaines classifiées comme armes de guerre.

Neuf personnes, âgées de 22 à 40 ans, sont jugées à partir de ce lundi 23 septembre pour leur implication supposée dans un trafic d’armes et de munitions entre mars 2022 et mai 2023 et leur éventuelle participation à une association de malfaiteurs.

À l’heure où les comptes entre narcotrafiquants se règlent à balles réelles, ce procès devrait permettre de mieux comprendre la provenance des armes qui circulent dans les quartiers. Ou comment une arme achetée à Bordeaux peut servir et tuer à Toulouse ou ailleurs, dans un contexte de guerre des territoires sur fond de trafic de drogue.

Enquête technique

Partie en mars 2022 de la surveillance de l’entrée du domicile bordelais d’un des prévenus, l’enquête s’est vite intéressée au train de vie d’un jeune homme aujourd’hui âgé de 22 ans, Gratien Truchon, versé dans différents trafics lucratifs, conducteur habituel de voitures de luxe de location.

Les policiers ont eu recours aux moyens techniques les plus élaborés pour approcher des suspects méfiants »

Interception de lignes téléphoniques, sonorisation de voitures, pose de pastilles GPS pour géolocaliser les véhicules, installation dans des smartphones, à la manière d’un logiciel malveillant, d’un « keylogger » ou enregistreur de frappe : les policiers ont eu recours aux moyens techniques les plus élaborés pour approcher des suspects méfiants, communiquant par messagerie cryptée et se déplaçant à vive allure, ce qui rendait complexes et peu discrètes les surveillances physiques.

Gratien Truchon est placé par la justice à la tête du trafic. Il faisait même la publicité par photos, vidéos ou messages vocaux des armes dont il disposait, notamment des… « guitares » – comprendre les fusils d’assaut. Il est soupçonné d’avoir alimenté en armes différents réseaux. L’un à Bordeaux – il a été vu dans différentes cités bordelaises et de l’agglomération –, l’autre à Toulouse, avec Jamel Bettouati, 32 ans, comme client.

Équiper les « soldats »

Condamné à vingt-deux ans de réclusion criminelle, peine confirmée en appel, pour avoir fourni des armes ayant servi le 3 juillet 2017 à Toulouse à un homme déguisé en femme voilée qui avait sorti une Kalachnikov d’une poussette, Jamel Bettouati était resté très actif depuis sa cellule. Il a effectué de nombreuses commandes au Bordelais afin d’équiper ses « soldats ».

Les investigations des policiers ont établi que Gratien Truchon avait plusieurs moyens d’approvisionnement. Plus ou moins légaux. Sous couvert d’une licence de tir sportif, sa compagne aurait ainsi acquis pas moins de onze fusils à pompe dans trois armureries différentes. D’autres proches se sont inscrits dans un club de ball-trap dans le même unique but de procéder à des achats similaires.

De vrais tireurs sportifs revendaient également sous le manteau armes et munitions qu’ils pouvaient acquérir légalement. Des armes arrivaient à Gratien Truchon aussi parce qu’il avait le réseau pour les écouler – la majorité provenait de cambriolages ciblés perpétrés par un père et son fils. Le business était florissant, il travaillait à flux tendus. Tous seront bientôt fixés sur leur sort judiciaire.