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Ci-git l’économie française, asphyxiée d’impôts – par Erwan Le Noan
Ci-git l’économie française, asphyxiée d’impôts – par Erwan Le Noan
Il fut une époque, lointaine, où les parlementaires luttaient âprement pour défendre les individus devant les prélèvements de la puissance publique et que le contrôle de l’Ogre fiscal était au fondement de leur mandatA peine s’était-il vu confier la charge du Royaume, Turgot écrivit au monarque pour énoncer ses principes d’administration : « Point de banqueroute ; point d’augmentation d’impôts ; point d’emprunts ». Il ajoutait : « Pour remplir ces trois points, il n’y a qu’un moyen. C’est de réduire la dépense au-dessous de la recette ».
Cette leçon simple semble totalement ignorée de nos élus. La dette publique caracole au sommet. Les recettes publiques représentent plus de la moitié de la richesse nationale. Parmi ces ressources, les prélèvements obligatoires atteignent un record – la France a, de façon répétée, des impôts qui grèvent lourdement sa compétitivité.
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Qu’importe ! Les députés se livrent à une course folle de créativité fiscale. Il fut une époque, lointaine, où les parlementaires luttaient âprement pour défendre les individus devant les prélèvements de la puissance publique, considérant qu’il était de leur devoir de préserver leur autonomie (la liberté et la propriété restent les deux premiers « droits naturels et imprescriptibles » de la Déclaration de 1789) et que le contrôle de l’Ogre fiscal était au fondement de leur mandat.
Comment peut-on s’égosiller à dénoncer invariablement la « vie chère » et dans le même temps multiplier compulsivement les charges qui pèsent sur les contribuables ? Comment peut-on déplorer l’affaissement de la compétitivité française, quand on chérit les causes administratives qui la font ployer et dépérir ?
La démocratie représentative est née, ce n’est pas anodin, de l’obsession des représentants du peuple d’assurer qu’aucun impôt n’est prélevé de façon excessive et que l’Etat ne s’ingère pas démesurément dans la vie des citoyens. Désormais, par un basculement étourdissant, les voici plus prompts à se mettre au service des institutions qu’ils doivent contrôler qu’à protéger ceux qu’ils sont supposés défendre ! Ils s’empressent de faire croître ce qu’ils devraient contenir. Ils se hâtent d’écraser ce qu’à défaut de faire éclore, ils devraient préserver.
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Efficacité. De leurs côtés, alors que les dépenses publiques explosent, des membres de l’exécutif réclament qu’elles augmentent encore – quand leur obsession devrait, au contraire, être de garantir l’efficacité de celles existantes, voire d’envisager leur réduction. Turgot, là aussi, avait dit juste : « Chaque ordonnateur, dans sa partie, soutiendra que presque toutes les dépenses particulières sont indispensables ». Il répliquait, implacable : « Il faut que toutes ces raisons cèdent à la nécessité absolue de l’économie ».
Comment peut-on s’égosiller à dénoncer invariablement la « vie chère » et dans le même temps multiplier compulsivement les charges qui pèsent sur les contribuables ? Comment peut-on déplorer l’affaissement de la compétitivité française, quand on chérit les causes administratives qui la font ployer et dépérir ?
La réponse ne peut malheureusement être trouvée que dans deux voies décourageantes : soit l’ignorance de ce que l’économie est un jeu d’incitations, soit la présomption que les acteurs privés sont immatures et néfastes. Benjamin Constant avait prévenu : « La société n’ayant d’autres droits sur les individus que de les empêcher de se nuire mutuellement, elle n’a de juridiction sur l’industrie qu’en supposant celle-ci nuisible ».
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L’économie française stagne. Notre dynamisme fléchit. Dans la concurrence mondiale, nos universités s’effacent, notre industrie s’affaisse. Les mouvements économiques qui façonnent l’avenir sont de moins en moins sur notre continent. Sans s’abandonner à la facilité des lamentations déclinistes, c’est un fait que la France et l’Europe cèdent progressivement leur place. Au lieu de briser systématiquement la société et l’économie sous le poids d’une fiscalité destructrice, nos élus seraient mieux inspirés d’en rechercher obsessionnellement la prospérité.
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