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    Danemark : Emmanuel Macron, les « Gaulois réfractaires » et les Danois « luthériens »

    La phrase du président illustre à la fois son admiration pour ce modèle de « flexisécurité » et son envie de « changement culturel » pour la France.

    LE MONDE | 29.08.2018 à 21h21 • Mis à jour le 30.08.2018 à 10h32

     

    Devant la reine de Danemark, Margrethe II, Emmanuel Macron s’est amusé, mercredi 29 août, à comparer les Danois, « peuple luthérien » ouvert aux transformations, aux Français, des « Gaulois réfractaires au changement ». Evoquant son admiration pour le modèle danois de « flexisécurité », il a admis que les différences culturelles entre les deux nations ne permettaient pas de le répliquer à l’identique.

    « Il ne s’agit pas d’être naïf, ce qui est possible est lié à une culture, un peuple marqué par son histoire ».

    Mais le président français pense avoir réussi depuis son élection à provoquer un « changement culturel » chez les Français.

    « Vous verrez la France transformée par son peuple. Les gens changent d’état d’esprit, ils sont beaucoup plus ouverts au risque ».

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    Le député de La France insoumise Alexis Corbière a dénoncé des « propos d’une sottise confondante »De son côté, la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a réagi : « Au Danemark, Macron fustige le “Gaulois réfractaire au changement” : comme d’habitude, il méprise les Français depuis l’étranger ! Les “Gaulois” vont se faire un plaisir de répondre à son arrogance et à son mépris ! »

    « Entre négation de l’identité française et nouvelle insulte au peuple français, le président Rothschild Emmanuel Macron s’est encore surpassé au Danemark »a commenté le député du parti Les Républicains Fabien Di Filippo.

    Les « Gaulois réfractaires », ce sont les « partis politiques »

    Face à ces réactions, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a tenté de revenir, jeudi matin sur France 2, sur les propos de M. Macron. Selon lui, quand le chef de l’Etat a parlé de « Gaulois réfractaires », il évoquait « les partis politiques ».

    « Les Gaulois réfractaires, ce sont les partis politiques qui depuis trente ans ne veulent rien changer, qui depuis quinze jours nous jouent la “surviolence” dans les mots, qui veulent retrouver le confortable clivage gauche-droite parce qu’ils l’ont toujours connu ».

    A l’inverse, « les Français ont démontré depuis un an qu’ils avaient fait le pari d’un changement profond en élisant un jeune président de la République, en faisant confiance à des gens issus de la société civile » à l’Assemblée nationale, a-t-il poursuivi.

    « Le vrai Danois n’existe pas »

    Comme en réponse aux nationalistes qui, de la Hongrie à l’Italie, le désignent comme leur adversaire principal, Emmanuel Macron a aussi tout au long de sa visite au Danemark beaucoup parlé d’identité. Dans une sorte d’« en même temps », il a défendu la place des identités nationales, mais qu’il veut combinerà un attachement à l’Europe.

    Il a approuvé le Danemark pour être à la fois « complètement ouvert au reste du monde et attaché à sa culture propre ».

    « La France aussi est profondément attachée à sa culture, à ses valeurs, cette identité profonde et complexe, qui s’est toujours pensée dans l’universalisme. Mais la France n’a jamais été elle-même en étant fermée au reste du monde ».

    Dans la même veine, il avait déjà, lundi, lors de son discours devant les ambassadeurs, applaudi le « retour des identités des peuples ».

    Interpellé par une étudiante danoise sur l’avenir des identités en Europe, M. Macron lui avait répondu, provocateur : « Le vrai Danois n’existe pas, il est déjà européen. Même votre langue n’est pas seulement le danois, elle est part de la langue européenne. » « C’est vrai aussi pour les Français », a-t-il ajouté.

     


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    Les réponses apportées à la crise de 2008 ont déstabilisé l’ordre politique et géopolitique. Longtemps perçues comme la forme ultime de gouvernement, les démocraties libérales sont sur la défensive. Face aux « élites » urbaines, les droites nationalistes mènent une contre-révolution culturelle sur le terrain de l’immigration et des valeurs traditionnelles. Mais elles poursuivent le même projet économique que leurs rivales. La médiatisation à outrance de ce clivage vise à contraindre les populations à choisir l’un de ces deux maux.

    Budapest, 23 mai 2018. Veste sombre un peu ample et chemise violette ouverte sur un tee-shirt, M. Stephen Bannon se plante devant un parterre d’intellectuels et de notables hongrois. « La mèche qui a embrasé la révolution Trump a été allumée le 15 septembre 2008 à 9 heures, quand la banque Lehman Brothers a été contrainte à la faillite. »L’ancien stratège de la Maison Blanche ne l’ignore pas : ici, la crise a été particulièrement violente. « Les élites se sont renflouées elles-mêmes. Elles ont entièrement socialisé le risque, enchaîne cet ancien vice-président de la banque Goldman Sachs, dont les activités politiques sont financées par des fonds spéculatifs. Est-ce que l’homme de la rue a été renfloué, lui ? » Un tel « socialisme pour les riches » aurait provoqué en plusieurs points du globe une « vraie révolte populiste. En 2010, Viktor Orbán est revenu au pouvoir en Hongrie » ; il fut « Trump avant Trump ».

    Une décennie après la tempête financière, l’effondrement économique mondial et la crise de la dette publique en Europe ont disparu des terminaux Bloomberg où scintillent les courbes vitales du capitalisme. Mais leur onde de choc a amplifié deux grands dérèglements.

    Celui, en premier lieu, de l’ordre international libéral de l’après-guerre froide, centré sur l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), les institutions financières occidentales, la libéralisation du commerce. Si, contrairement à ce que promettait Mao Zedong, le vent d’est ne l’emporte pas encore sur le vent d’ouest, la recomposition géopolitique a commencé : près de trente ans après la chute du mur de Berlin, le capitalisme d’État chinois étend son influence ; appuyée sur la prospérité d’une classe moyenne en ascension, l’« économie socialiste de marché » lie son avenir à la mondialisation continue des échanges, laquelle désosse l’industrie manufacturière de la plupart des pays occidentaux. Dont celle des États-Unis, que le président Donald Trump a promis dès son premier discours officiel de (...)