• Glyphosate : une étude mondiale révèle que de faibles doses causent une leucémie chez les rats

    Une étude toxicologique internationale, rendue publique le 25 octobre, démontre que le glyphosate provoquerait une leucémie chez des rats, et des décès consécutifs à un âge précoce. Des résultats jugés très préoccupants, alors que la Commission européenne campe sur sa volonté de renouveler pour dix ans l’autorisation des herbicides contenant cette substance.

     

     

    Chaque année, on compte 385 millions de cas d’empoisonnements graves aux pesticides dans le monde, selon une étude du réseau PAN (Pesticides Action Network International). Alamy/ABACAPRESS.COM

    Alors que la Commission européenne propose de renouveler pour dix ans l’autorisation d’utiliser des herbicides à base de glyphosate, une étude scientifique toxicologique internationale vient sonner l’alarme, en rendant publics des résultats jugés « très préoccupants ».

    Coordonnée par l’institut Ramazzini en Italie, en lien avec des scientifiques d’Europe, des États-Unis et d’Amérique du Sud, elle révèle que de faibles doses d’herbicides à base de glyphosate provoqueraient une leucémie chez les rats, et que la moitié des « décès dus à la leucémie identifiée dans les groupes d’étude » auraient eu lieu « à un âge précoce ».

    Des résultats d’« importance pour la santé publique »

    Les premières données de cette étude mondiale, présentée comme « la plus complète jamais réalisée sur le glyphosate et les herbicides à base de glyphosate », ont été rendues publiques, le 25 octobre, à Bologne en Italie, lors de la conférence scientifique internationale « Environnement, travail et santé au XXIe siècle : stratégies et solutions à une crise mondiale ».

    Les scientifiques ont expliqué, à cette occasion, avoir abouti à ces résultats en administrant à des rats, pendant une longue période et dès la vie prénatale, du glyphosate et deux de ses formulations commerciales (la formulation représentative de l’UE Roundup BioFlow et la formulation américaine Ranger Pro).

    « Ces premiers résultats sont d’une telle importance pour la santé publique que nous avons décidé qu’il était essentiel de présenter dès maintenant une synthèse de nos données. Les données complètes seront accessibles au public dans les semaines à venir », a affirmé le Dr Daniele Mandrioli, coordinateur de cette étude mondiale, et directeur de l’institut Ramazzini.

    « Il serait irresponsable de ré-autoriser le glyphosate »

    L’enjeu, politique, est en effet de taille, à la veille d’une décision européenne cruciale concernant l’autorisation, pour les dix années à venir de cette molécule, dont les effets toxiques sur l’homme (cancérogénicité, neurotoxicité, toxicité pour les organes, perturbations endocriniennes, toxicité pour le développement prénatal) et la nature, n’ont cessé d’être documentés scientifiquement et étayés par des témoignages de victimes.

    « Il serait totalement irresponsable de ré-autoriser le glyphosate sans prendre en compte cette nouvelle alerte de la science du potentiel danger du glyphosate pour la santé humaine. La Commission Européenne doit retirer sa proposition de ré-autorisation du glyphosate », ont dénoncé dans un communiqué les ONG Foodwatch, Générations Futures et WeMove, qui ont lancé une pétition commune, ayant déjà recueilli plus de 600 000 signatures.

    L’autorisation actuelle d’utilisation de cet herbicide, substance active du fameux Roundup de Monsanto-Bayer, renouvelée en 2017 pour cinq ans, devait expirer le 15 décembre 2022 et avait été prolongée, le temps d’une évaluation scientifique de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), sur la base de laquelle la Commission européenne a jugé que le niveau de risque ne justifiait pas d’interdire la substance.


  • ARN messager : les coulisses d’une révolution vaccinale

    Des déceptions au Prix Nobel : dans le documentaire "Les aventuriers de l’ARN messager" diffusé ce samedi sur Arte, les journalistes Fabrice Delaye et Raphaël Hitier racontent cette épopée scientifique.

     

     

    L'ARN messager, une révolution pour la médecine

     

    C’est l’histoire d’une rencontre, un peu fortuite, à la photocopieuse de l’université de Pennsylvanie, entre deux chercheurs que tout oppose. Nous sommes dans les années 1990. Katalin Karikó fanfaronne, devant un inconnu à l’air sévère, en blouse blanche. La biochimiste hongro-américaine lui parle des remèdes qu’elle tente de créer dans son laboratoire, en détournant les molécules qui dictent à nos cellules ce qu’elles doivent faire. Son compagnon de polycopie lui rétorque, qu’un jour, il vaincra le sida.

    De ce match raconté dans le documentaire Les aventuriers de l’ARN messager, diffusé ce samedi, à 22h20 sur Arte, naîtra, trente ans plus tard, l’une des découvertes du siècle, la solution contre l’une des pires pandémies contemporaines. L’inconnu à la photocopie n’est d’autre que l’immunologiste américain Drew Weissman ; le duo a permis l’invention du vaccin contre le Covid-19 et vient de recevoir le prix Nobel de médecine, ce lundi 2 octobre.Nourri par l’ouvrage de référence La révolution de l’ARN messager, vaccins et nouvelles thérapie (Odile Jacob) du journaliste Fabrice Delaye, Les aventuriers de l’ARN messager restitue les hasards, les combats, et l’abnégation des hommes et des femmes qui ont participé à cette révolution scientifique. De la maîtrise de l’ARN messager, une technologie longtemps boudée par Big Pharma, naissent désormais les espoirs les plus fous, du vaccin contre le cancer à la thérapie personnalisée, disponible en quelques minutes, efficace contre n’importe quelle maladie.

    Des chercheurs qui déambulent façon Top Gun

    Ce long métrage de 1h30 réalisé par Raphaël Hitier - ancien technicien de l’ARN - déjoue le piège du récit industriel aseptisé. On y croise des chercheurs austères dans des couloirs grisâtres qui déambulent façon Maverick dans Top Gun, sur du rock’n’roll, avant d’entrer dans les détails techniques, rendus fascinants grâce aux illustrations acidulées du collectif Les Astronautes. On apprivoise aussi les déçus de l’histoire, comme l’Américain Robert Malone, premier à utiliser l’ARN messager sur la souris, devenu vaccino-sceptique et désormais proche des populistes.

    Drew Weissman a reçu avec Katalin Karikó le prix Nobel de médecine ce lundi pour ses travaux sur l'ARN messager qui ont notamment conduit à la fabrication du vaccin contre le Covid-19Drew Weissman a reçu avec Katalin Karikó le prix Nobel de médecine ce lundi pour ses travaux sur l'ARN messager qui ont notamment conduit à la fabrication du vaccin contre le Covid-19

    Drew Weissman a reçu avec Katalin Karikó le prix Nobel de médecine ce lundi pour ses travaux sur l'ARN messager qui ont notamment conduit à la fabrication du vaccin contre le Covid-19

     © / Découpages

    L’épopée de l’ARN messager est faite d’embûches, de ratés, de frustrations : beaucoup de chercheurs se sont vu refuser leur financement, malgré des découvertes prometteuses. Car jusqu’à la fin des années 2000, l’ARN était considérée comme trop fragile pour permettre des applications industrielles. Ce brin d’acide, qui sert de mot d’ordre à l’activité cellulaire, se casse très facilement. En 1993, les Français Frédéric Martinon et Pierre Meulien démontraient déjà qu’il était possible de vacciner avec ces molécules, sans pour autant décrocher de financement.les deux Nobels 2023 ont, eux, dû patienter des années avant d’obtenir les capsules nécessaires pour acheminer l’ARN dans le corps. Sans elles, impossible de démontrer qu’ils avaient compris comment stopper la terrible réaction inflammatoire que déclenchaient les prototypes de vaccins de l’époque, dernier frein à leur usage. A l’avant-première parisienne du film, Steve Pascolo, autre Français pionnier de l’ARN, rappelle que sa start-up, Curevac, était elle aussi très avancée, avant d’échouer face à Moderna et Pfizer. Ce sont tous ces vécus que raconte le documentaire, rendant son humanité à la conquête scientifique.





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