• Témoignage

    «C’était un déchaînement de violence» : à Paris, un cycliste victime d’une violente agression par le conducteur d’un scooter

     
     
    Maxime, 38 ans, a été violemment agressé mardi 15 octobre dans le XIIIe arrondissement, le jour de la mort de Paul Varry, qui a relancé le débat sur les violences routières subies par les cyclistes. Victime de multiples fractures au niveau du visage, il a porté plainte pour que les «violences routières cessent». Le parquet de Paris a ouvert une enquête.
    publié le 25 octobre 2024 à 15h00
    (mis à jour le 25 octobre 2024 à 18h56)
     

    «Je suis encore dans un black-out total, tout est flou dans mon esprit.» Maxime, consultant dans l’économie âgé de 38 ans, remonte le fil de la «violence routière sans précédent» dont il a été victime il y a une dizaine de jours avec une voix tremblante. Il s’emporte, de l’autre côté du combiné, contre une «agression uniquement permise par [s]on statut de cycliste», car «jamais on ne se permettrait de violenter comme ça un automobiliste». Une «nouvelle illustration de ce manque de civisme récurrent sur la route» et des tensions croissantes entre automobilistes et cyclistes, un débat relancé par la mort de Paul Varry, jeune cycliste de 27 ans écrasé par le conducteur d’un SUV la semaine dernière.

    Maxime, qui souhaite conserver son anonymat «par peur de représailles», annonce qu’il se fera opérer aujourd’hui pour une reconstruction nasale, l’une des nombreuses séquelles physiques de son agression commise par le conducteur d’un scooter. Il présente également une fracture de l’orbite et un traumatisme crânien. Il a pour l’instan

     

  • Les étrangers demandeurs d’une carte de séjour pluriannuelle, doivent-ils uniquement «assister à des cours de français», comme le dit le secrétaire d’Etat Othman Nasrou ?

    Le secrétaire d’Etat chargé de la citoyenneté souhaite conditionner l’obtention de titres de séjour à un niveau minimum de maîtrise du français. Une exigence qui existait déjà pour la carte de résident et qui a été introduite par la loi Darmanin de 2024, pour les demandeurs de la carte pluriannuelle.
    publié le 25 octobre 2024 à 19h26
     
     

    En matière d’intégration, le nouveau secrétaire d’Etat chargé de la Citoyenneté et de la Lutte contre les discriminations, Othman Nasrou, a annoncé dans de nombreux médias qu’il veut conditionner l’obtention des titres de séjour à une plus grande maîtrise de la langue française.

    Dans un entretien au Parisien, le 22 octobre, le secrétaire d’Etat rattaché au ministère de l’Intérieur affirme qu’«aujourd’hui, un étranger inscrit dans un “contrat d’intégration républicaine” doit assister à un certain nombre de cours de français, jusqu’à 600 heures selon les cas ; mais sans obligation de niveau à la fin». Sur Europe 1, jeudi 24 octobre, Othman Nasrou soutient à nouveau qu’«aujourd’hui, au moment où on parle, l’obligation est effectivement une obligation d’assiduité donc d’assister à un certain nombre d’heures de cours qui vous sont indiqués, en fonction de votre niveau. Mais effectivement il n’y a pas de test à la fin pour vérifier l’atteinte [d’un niveau de langue]».

    Pour remédier à cette absence de niveau de langue exigé pour qu’un étranger obtienne un titre de séjour, le secrétaire d’Etat a détaillé son plan au Parisien : «Nous allons désormais demander [à un étranger] de passer un examen pour vérifier l’atteinte d’un certain niveau de français. Pour un titre de séjour pluriannuel, il faudra être au moins à un niveau A2, c’est-à-dire l’équivalent d’une langue vivante étrangère pour les collégiens français en 4e. Pour une carte de résident, ce sera le niveau B1, c’est-à-dire le niveau d’une langue vivante étrangère de classe de troisième.» Les niveaux évoqués correspondent au classement établi par le cadre européen de référence pour les langues (CECRL).

    Dans cet entretien, Othman Nasrou reconnaît toutefois que la loi immigration de 2024, dite loi Darmanin, a introduit ces objectifs de niveau de langue, qui permettent de refuser la délivrance d’une carte pluriannuelle, d’une carte de résident ou d’une naturalisation. «Je souhaite que l’on accélère leur préparation et même leur mise en œuvre. La loi prévoit que, au 1er janvier 2026, ces dispositions soient opposables à la délivrance d’un titre de séjour. Je vais demander aux préfets que nous soyons opérationnels dès le 1er juillet 2025 à titre expérimental dans le domaine de la maîtrise du français», déclare le secrétaire d’Etat.

    Les déclarations d’Othman Nasrou contiennent du vrai comme du faux. La loi Darmanin a effectivement introduit une connaissance minimale de la langue française (niveau A2) pour les immigrés qui demandent une première carte de séjour pluriannuelle. Cette carte de séjour, généralement valable quatre ans, est uniquement délivrée après l’obtention d’une carte de séjour temporaire. Mais les étrangers devaient déjà justifier d’un niveau minimal de français pour la naturalisation ou la demande d’une carte de résident, valable dix ans.

    «Sans obligation de résultat»

    Dans un dossier consacré au critère de langue de la loi Darmanin, antérieur à la promulgation de cette loi immigration, l’association d’aide aux étrangers, la Cimade, expliquait les règles alors en vigueur : «Aujourd’hui, les personnes n’ayant pas le niveau débutant en français (niveau A1) et désirant avoir une carte pluriannuelle (de deux à quatre ans) ont l’obligation de suivre entre 200 à 600 heures de cours de français.» Ce que confirmait le site du Service public dans le dossier accompagnant la loi Darmanin : «Aujourd’hui, ces cartes de séjour, en général valables quatre ans, sont délivrées à la seule condition d’avoir suivi un apprentissage du français dans le cadre du contrat d’intégration républicain, mais sans obligation de résultat.»

    Joint par CheckNews, le professeur de droit public à l’Université de Grenoble et spécialiste du droit des étrangers Serge Slama confirme que «dans le système actuel, avant l’entrée en vigueur de la loi Darmanin sur ce point, les étrangers passent tout de même le test de niveau même si cela n’a pas d’incidence sur la délivrance de la carte de séjour pluriannuelle. Mais ils peuvent obtenir la certification, qui est utile dans d’autres démarches comme l’université». L’introduction d’une maîtrise du français requise pour les demandes de cartes pluriannuelles «a bien été prévue par la loi du 26 janvier 2024, mais les décrets d’application n’ont pas encore été pris. Ça doit rentrer en vigueur le 1er janvier 2026 le temps que les opérateurs de l’Ofii s’adaptent», indique l’universitaire.

    Si l’introduction d’un niveau de français a donc bien été mise en place par la loi Darmanin, les déclarations d’Othman Nasrou peuvent sembler trompeuses puisqu’elles ne font pas de distinction avec la situation des demandeurs d’une carte de résident, valable 10 ans, pour laquelle une obligation de maîtrise de la langue était déjà demandée avant la loi Darmanin.

    Comme le rappelait la Cimade, avant la loi immigration promulguée en janvier, il fallait «présenter un diplôme de français. Les examens pour le diplôme doivent être organisés par des structures agréées par l’Etat et les frais d’inscription varient de 90 euros à 140 euros». Le niveau de français exigé pour la carte de résident était celui du A2. Avec la loi immigration, le gouvernement précédent a relevé l’exigence au niveau B1, qui est recommandé aux étudiants étrangers pour suivre des cours à l’université. De même pour la naturalisation (les démarches pour obtenir la nationalité française), la loi Darmanin a fait passer l’exigence d’un niveau B1 à B2.

    Une mesure qui ne s’applique pas aux Algériens

    Que se passera-t-il si les étrangers échouent à ces tests de langue ? «Ces étrangers resteront bloqués sur un séjour temporaire qui rend plus difficile l’intégration (difficulté d’accès au logement, aux prêts bancaires, etc.)», estime Serge Slama. Il estime que cette exigence d’un certain niveau de langue est «discriminatoire» car elle «favorise les étrangers qui ont déjà un bon niveau éducatif c’est-à-dire qui appartiennent à certaines classes sociales favorisées». Un étranger venu d’un pays où il n’a pas bénéficié du bon système scolaire, notamment en matière d’alphabétisation, aura plus de difficulté à obtenir une certification A2, en raison des épreuves d’écriture ou de compréhension écrite.

    Suite à la publication de cet article, Serge Slama nous a transmis la remarque de l’avocate Anaïs Place, spécialisée dans le droit des étrangers, qui observe que «les étrangers qui échouent au test de langue resteront bloqués sur un séjour temporaire puis perdront leur droit au séjour puisque la loi du 26 janvier 2024 a également prévu que «Par dérogation à l’article L. 433-1, il ne peut être procédé à plus de trois renouvellements consécutifs d’une carte de séjour temporaire portant une mention identique». Pour le professeur de droit public, cet aspect de la loi aura pour conséquence de créer « encore une usine à OQTF » puisque «l’étranger avec une carte de séjour temporaire, qui échoue trois fois au test, aura un refus et une obligation de quitter le territoire français».

    Une inquiétude partagée par la Cimade dans un décryptage de la loi Darmanin: « Cette limitation à trois titres temporaires (d’une durée d’un an) portant une même mention aura un effet particulièrement absurde et terrible pour les personnes étrangères : un certain nombre d’entre elles ne seront plus régularisées que pour trois ans au maximum, et redeviendront sans-papiers après cette période. Cette limitation fermera définitivement la porte aux personnes précaires non francophones, qui ne parviendront peut-être pas à obtenir une carte pluriannuelle ou une carte de résident faute d’obtention d’un niveau suffisant en français, à l’image du public peu ou pas scolarisé et dont la langue maternelle a une grande distance linguistique avec le français ».

    Selon l’étude d’impact de la loi Darmanin, avec cette exigence de niveau de langue, «15 000 à 20 000 signataires [d’un contrat d’intégration] se verraient refuser une carte de séjour pluriannuelle si l’on exigeait le niveau A2».

    A noter que cette mesure ne s’applique pas aux étrangers issus de l’Union européenne, ni aux Algériens puisqu’ils bénéficient de l’accord franco-algérien de 1968, ni aux étrangers qui ont obtenu le bénéfice du statut de réfugié, de la protection subsidiaire ou du statut d’apatride.

    Article mis à jour le 25 octobre à 22h28: ajout de l’analyse de l’avocate Anaïs Place, de la Cimade et de Serge Slama, sur la limitation à trois test pour les étrangers ayant un titre de séjour temporaire.


  • Hack

    Free victime d’un piratage, les données de 19 millions de clients potentiellement dans la nature

    Cybercriminalitédossier
     
    Le fournisseur d’accès à Internet a confirmé dans un mail envoyé à ses clients, ce samedi 26 octobre, avoir été victime «d’une cyberattaque ciblant un outil de gestion».
    par LIBERATION
    publié aujourd'hui à 11h33
     
     

    Un hack d’ampleur chez le deuxième fournisseur d’accès à Internet de France. Dans un mail envoyé dans la nuit du vendredi 25 au samedi 26 octobre à ses clients, que Libération a pu consulter, Free a confirmé avoir été la victime récente «d’une cyberattaque ciblant un outil de gestion».

    Selon l’opérateur mobile fondé par Xavier Niel, «cette attaque a entraîné un accès non autorisé à une partie des données personnelles» des abonnés dont les noms, prénoms, adresses mail et postales, dates et lieux de naissance, numéros de téléphone, identifiants abonnés et données contractuelles. Les mots de passe ne seraient toutefois pas concernés.

    Le hack avait été revendiqué en début de semaine sur un célèbre site de revente de données volées. Le vendeur y affirmait détenir les données de «tous les clients Free mobile et Freebox», soit «19,2 millions de clients» et les IBAN de 5,11 millions d’abonnés à Internet.

    Selon l’expert en cybersécurité SaxX_, qui avait publié à ce sujet sur son compte X mardi, la fuite daterait du 17 octobre et se diviserait en deux bases de données distinctes : les fiches clients et les IBAN.

    «Grande vigilance»

    Pour le moment, Free n’a pas dit un mot concernant le vol éventuel de données bancaires. Le fournisseur d’accès à Internet dit avoir notifié l’attaque à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) et à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi).

    L’entreprise annonce également avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République et rappelle que «l’auteur de ce délit s’expose à une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende». Dans les jours à venir, elle invite ses clients «à la plus grande vigilance face au risque d’emails, SMS ou appels frauduleux».


  • Adaptation

    Climat : dans toute la France, les ponts menacés par les crues, la sécheresse et la chaleur

    Cette année, de nombreux ouvrages se sont effondrés, emportés par les flots. Alors que le plan d’adaptation au réchauffement climatique est présenté ce vendredi 25 octobre, des milliers de structures vulnérables ont besoin de réparations.
    publié le 25 octobre 2024 à 14h23
     
     

    «J’étais en train de filmer quand j’ai soudain ressenti de grosses vibrations sous mes pieds. Alors j’ai reculé de deux mètres. Et en une seconde, sous mes yeux, le pont est parti, emporté par les flots. C’était vraiment très impressionnant…» Giovanni, un habitant du département de la Loire, a raconté au journal le Progrès comment il avait assisté, le 17 octobre, à l’effondrement du pont de la Tour de Chavanay. Les récentes pluies diluviennes, qui ont fait déborder de nombreux cours d’eau, ont aussi endommagé plusieurs ouvrages d’art. Rien que dans la Loire, cinq ponts ont été emportés ; le viaduc de Vauron, malmené par les intempéries, est en réparation et la ligne TER Saint-Etienne-Lyon qui l’emprunte ne fonctionne plus. Dans le Gard, le village de Chamborigaud est coupé en deux. «Le pont avait déjà été endommagé par une crue en mars dernier et a de nouveau été touché la semaine dernière», rapporte France Info. Dans le Pas-de-Cala

     

  • Violette Babocsay fait partie de ceux qui ont choisi de mener le combat sur les réseaux sociaux contre les régimes "magiques" des charlatans.

    Violette Babocsay fait partie de ceux qui ont choisi de mener le combat sur les réseaux sociaux contre les régimes "magiques" des charlatans.
    DR - Instagram

    Sur les réseaux sociaux, ces régimes ultra-restrictifs qui inquiètent les professionnels

     

    Arrêter le sucre ou le gluten, contrôler son taux de glucose, s’imposer une alimentation anti-inflammatoire, éviter tous les produits transformés… Sur les réseaux sociaux, les différentes injonctions à contrôler drastiquement son alimentation pullulent. Devant la radicalité de ces discours, certains professionnels de santé s’alarment.

     

    « Je me sens tellement mieux depuis que j’ai arrêté de manger ces cochonneries, les amis, c’est une libération pour moi, comme arrêter une drogue dure ! » Sur ses réseaux sociaux, Juliette* partage tout. Son quotidien en tant que jeune communicante pour une marque, ses astuces de décoration, ses conseils pour se remettre d’une rupture… Depuis quelques mois, un nouveau thème a trouvé sa place dans son fil d’actualité : son rééquilibrage alimentaire. « Après des années d’études à manger n’importe quoi, il fallait vraiment que je commence à mieux manger, confie-t-elle. J’avais pris une vingtaine de kilos en cinq ans, je suis contente d’avoir trouvé une formule qui soit efficace pour les perdre. »

    Le secret de cette formule magique, Juliette l’a découvert sur TikTok. « J’ai commencé par arrêter les sucres rapides, l’étape la plus difficile, puis les produits transformés en général et le gluten », explique la jeune femme, souriante, mais un peu pâle. N’est-ce pas drastique ? Draconien ? « C’est surtout très efficace, et je me sens mieux dans mon corps, mais oui je me suis privée, c’est inévitable quand on veut perdre du poids », résume-t-elle, indiquant qu’elle s’est délestée d’une vingtaine de kilos… en seulement quatre mois. Juliette étant satisfaite, elle partage donc la recette miracle de sa perte de poids auprès de sa communauté, très jeune.

    À LIRE AUSSI : Régimes, détox : ils nous font tout gober

    Sur TikTok ou Instagram, impossible désormais d’échapper aux discours sur l’addiction au sucre ou sur les bénéfices d’un arrêt du gluten, ou encore des bienfaits d’adopter un régime anti-inflammatoire pour soulager maux de ventre ou endométriose. C’est d’ailleurs la pratique alimentaire qui a trouvé grâce aux yeux de Lilia, 30 ans, atteinte d’une endométriose très lourde et invalidante. « J’avais vu sur les réseaux sociaux une influenceuse américaine atteinte d’endométriose qu’elle avait réussi à vivre normalement après avoir adopté un régime anti-inflammatoire, explique l’institutrice. Dans mon métier, les absences dues à mes douleurs sont pénalisantes pour mes élèves, j’avais vraiment besoin de trouver un moyen de me soulager. ».

    En 2022, elle commence donc à suivre à la lettre un régime anti-inflammatoire. Adieux les produits laitiers, le gluten, les viandes rouges, le café, le sucre, etc. En l’espace de quelques mois, Lilia a vu son poids passer d’une soixantaine de kilos… à cinquante… puis moins. « Je n’ai noté aucune amélioration dans mes douleurs, en revanche, je tombais malade », s’émeut-elle. « Mon médecin a décidé de m’arrêter et de me proposer une hospitalisation en me disant qu’il craignait que je ne sois tombée dans l’anorexie mentale », se désole-t-elle encore. « Aujourd’hui, ça va mieux, mais je continue de voir des vidéos de femmes qui font la promotion de ce genre de pratiques », dénonce Lilia, inquiète pour les plus jeunes.

    « Vous n’avez pas de pulsions de sucre en raison d’une addiction au sucre »

    C’est contre ce type de discours que la jeune diététicienne-nutritionniste Violette Babocsay se bat au quotidien sur les réseaux sociaux. S’orientant d’abord vers des études de droit, la jeune femme s’intéresse très rapidement à l’alimentation et décide de passer un BTS diététique. Alors, pour elle, « avoir accès à un contenu sur la nutrition à travers Internet, c’est une vraie richesse ». Mais « 90 % de ce qui y est dit est erroné », reconnaît-elle.

    Reprenant les vidéos desdits influenceurs, elle « débunke » habilement certaines idées reçues. Quand un médecin suggère de « ronger des amandes » pour apaiser ses « pulsions de sucre », elle répond sans détour : « Vous n’avez pas de pulsions de sucre en raison d’une addiction au sucre. En réalité, vous n’avez même pas de pulsions de sucre, vous ne videz pas un sachet de sucre en poudre à la petite cuillère ». Appuyant ses discours par de nombreuses études, elle tente de placer « le bien-être physiologique au même niveau que le bien-être psychologique : pas de régime restrictif avec des règles intenables sur le long terme ».

    À LIRE AUSSI : Jeûnes, crudivorisme : ces régimes alimentaires à l'épreuve de la (vraie) science

    Quant aux discours en vogue et la promotion de ces cures à long terme, elle indique que « cela concerne très souvent des personnes qui n'ont pas de qualifications du tout, ou alors des qualifications non reconnues ». Naturopathe, coachs en nutrition, coach « holistique », coachs perte de poids, nutrithérapeutes, micronutritionnistes… nombreuses sont les qualifications qu’adoptent ces nouveaux gourous de l’alimentation. Et si la promotion de ces pratiques alimentaires par des personnes non-qualifiées inquiète, nombreux sont les médecins qui les vantent également. « Le docteur Dukan (radié de l'Ordre des médecins depuis 2013), le docteur Cohen, le docteur Delabos l’inventeur de la "chrononutrition", le docteur Allouche ou encore docteur Jimmy Mohamed font partie de cette catégorie-là, s’attriste la nutritionniste. Il est beaucoup plus difficile de lutter contre leur discours car la plupart des gens ne conçoivent pas qu'un diététicien soit mieux renseigné qu'un médecin qui a fait plus de dix ans d’études. »

    Un constat partagé par sa consœur Anne-Laure Laratte. « Ces régimes prônent des bons et des mauvais aliments pour jouer sur la perte de poids, en disant qu’il existe des solutions “magiques” à base de tel ou tel aliment », s’agace cette diététicienne nutritionniste, spécialisée en addictologie générale et troubles des conduites alimentaires. « Les personnes vulnérables qui tombent sur ce genre de contenus peuvent donc limiter leur alimentation en quantité et qualité ainsi qu’en termes de choix d'aliment, ce qui leur ouvre une porte aux troubles alimentaires. Aliments qui font grossir, maigrir, bons, mauvais, à manger, à ne pas manger… », poursuit-elle. « Les modes évoluent et désormais le sucre serait une drogue, le gluten pro-inflammatoire, les régimes anti-inflammatoires réduiraient les douleurs… Tous ces régimes sont juste en vogue, mais n'ont fait état d'aucune preuve scientifique. »

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    Récemment, la publication de l’ouvrage de Jessie Inchauspé, La Méthode Glucose Goddess, a fait couler beaucoup d’encre. La biochimiste recommande dans son livre, sur les réseaux sociaux et dans des vidéos relayées par des médias comme Konbini ou Quotidien de suivre au quotidien sa glycémie afin de baisser ses « pics de glucose ». Sur Instagram, elle appuie son discours de nombreux graphiques qui illustrent ces pics, qui participeraient à des maladies graves comme le cancer ou la maladie d’Alzheimer.

    Interrogée par Franceinfo, la chercheuse à l’INSERM Mathilde Touvier réagit. « Le fait d’avoir des pics de glucose après l’ingestion de certains aliments fait partie de la nature et notre corps est fait pour pouvoir réguler ses pics de glucose et ramener le taux de glucose sanguin à la normale », explique-t-elle, tout en indiquant qu’il est en revanche tout à fait sain de ne pas abuser de sucre dans son alimentation.

    Ne pas faire de généralité

    Contactée par Marianne, Sandrine Péneau, enseignante-chercheuse à l’université Sorbonne Paris Nord, affiliée à l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN) depuis 2009, nuance. « Il y a des choses intéressantes dans Glucose Goddess, tout à fait en accord avec les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS), comme l’augmentation de sa consommation de fibres ou la diminution de produits sucrés particulièrement lors du petit-déjeuner qui contient des céréales très sucrés… ».

    La professeure des universités ne nie pas les bienfaits de certains régimes… mais dans certains cas très spécifiques. « Certaines personnes peuvent avoir une sensibilité au gluten ou aux protéines de lait, donc adopter une alimentation moins inflammatoire peut être bénéfique, mais il ne faut pas en faire une généralité. » Et dans le cas du glucose, il convient de rester prudent. « Quelques-uns des axes de Jessie Inchauspé sont basés sur très peu d’articles scientifiques, il y a donc une nécessité d’avoir davantage de données avant d’en faire une recommandation générale », tempère-t-elle.

    « Par exemple, si le fait de consommer du vinaigre a permis à Inchauspé de réduire son pic glycémique, il n’est pas dit que ce sera le cas pour d’autres personnes », alerte la scientifique qui s’inquiète également de la rigidité du discours sur l’alimentation « qui pourrait éventuellement être un facteur de risque de TCA » [troubles des conduites alimentaires].

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    « Par ailleurs, même si elle déclare son approche comme étant "anti-régime", celle-ci reste très technique (ordre des aliments, vinaigre, monitoring du glucose etc.) et donc implique beaucoup de contrôle, ce qui peut conduire à rigidifier l’alimentation et pourrait éventuellement être un facteur de risque de TCA », alerte la chercheuse, dont les travaux portent sur les déterminants psychologiques des comportements alimentaires et de l’état nutritionnel. « L’alimentation et la santé, ça n’est pas que du glucose. C’est une approche très réductionniste. Le consommateur peut avoir la sensation que tout se résume à ça et oublier d’autres aspects importants tels que le fait d’être attentif à ce qu’on mange, la problématique des aliments ultratransformés ou encore l’impact environnemental, etc. »

     

    Venez débattre !

     


  • Les chômeurs seniors qui ont travaillé une partie de leur carrière à l'étranger sont particulièrement défavorisés par le durcissement des pratiques administratives.
    Philippe Huguen / AFP

    Comment France Travail veut durcir les conditions d'indemnisation des chômeurs seniors à partir de 2025

    Les chômeurs seniors qui ont travaillé une partie de leur carrière à l'étranger sont particulièrement défavorisés par le durcissement des pratiques administratives.

    Les demandeurs d'emploi seniors qui approchent de l’âge légal de la retraite de leur génération, peuvent être privés de leur allocation par France Travail, s'ils ne lui fournissent pas une attestation de régularisation de carrière (ARC). Or les caisses de retraite, submergées, peuvent mettre des mois à délivrer ces documents !

     

    À peine installée au ministère du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet a redonné la main aux partenaires sociaux, afin qu’ils négocient, d’une part, une nouvelle convention d’assurance chômage qui impactera l’indemnisation des plus de 55 ans. Et d’autre part, qu'ils aménagent les fins de carrière des seniors, afin que ces derniers puissent partir plus sereinement en retraite. Un changement de pied appréciable, par rapport aux postures du gouvernement Attal !

    Cependant Marianne tire le signal d’alarme. Il est un dysfonctionnement sur lequel syndicats et patronats doivent se pencher en urgence : la galère des privés d’emploi seniors qui approchent de l’âge légal de la retraite de leur génération.

    Durcissement administratif

    En effet, pour les indemniser ou poursuivre le versement de leur allocation de retour à l'emploi (ARE), France Travail leur réclame une attestation de régularisation de carrière (ARC) ; et plus un simple relevé de carrière approximatif, comme avant 2022. Pourquoi ce durcissement administratif ? France Travail tient à vérifier qu’il manque bien à ces chômeurs des trimestres de cotisation retraite pour liquider leur pension à taux plein. Car s’ils ont validé suffisamment de trimestres, ils n’ont légalement plus droit à une allocation chômage.

    France Travail leur coupe alors leur ARE. Plus gênant encore, si les caisses de chômage ont poursuivi par erreur ces versements, elles exigent le remboursement de ces « trop-perçus » qui peuvent atteindre des dizaines de milliers d’euros. Or les versements de pension, eux, ne sont pas rétroactifs, comme le soulignait le médiateur de France Travail, Jean-Louis Walter, dans son rapport d’avril 2024. En juillet dernier, cette tuile est d’ailleurs tombée sur la tête de 3 % des seniors dont le dossier a été réexaminé par les services de France Travail…

    À LIRE AUSSI : France Travail : comment la Macronie a cédé aux employeurs sur l'indemnisation chômage… qui tiquent encore

    Mais revenons aux seuls seniors qui approchent de l’âge légal de la retraite, sans avoir cotisé le nombre de trimestres nécessaire. S'ils n'anticipent pas très en amont leur situation, ils se heurtent à un autre mur : fournir d'urgence à France Travail cette attestation de régularisation de carrière (ARC) que doit leur délivrer leur caisse régionale de retraite (Carsat).

    S'ils formulent leur demande par Internet sur le site « Assurance retraite », sans spécifier l'urgence de leur requête, ils risquent de se retrouver sans ressources. Leur dossier sera en effet glissé dans les hautes piles de dossiers en attente. Car les Carsat du nord au sud de la France accusent des retards de traitement, notamment parce qu'elles déploient un nouveau système informatique complexe qui dégrade leur productivité.

    Ensuite, même si ces demandeurs d'emploi ont été correctement briefés en amont, et ont bien précisé leur statut « chômeur » dans leur requête internet, ils ne sont pas pour autant sortis d'affaires : en Midi-Pyrénées par exemple, un dossier sur cinq va être bloqué plusieurs mois. Pourquoi ? Parce que la Carsat, avant de délivrer une ARC, doit échanger avec l'armée, afin de reconstituer le cas échéant, les trimestres acquis pendant le service militaire. Surtout si l'assuré a travaillé au fil de sa carrière dans un pays étranger, elle devra s'adresser à ces administrations étrangères. Avec les pays du Maghreb, ces échanges peuvent prendre 6 à 7 mois !

    Ce n'est pas tout : la reconstitution de périodes d'apprentissage peut également prendre du temps. « Notre travail s’est complexifié et nous manquons de moyens humains pour surmonter ces difficultés », confie un employé. À Marseille, les chômeurs désespérés comme les futurs pensionnés peineront à obtenir un rendez-vous ou être reçus au guichet : cet accueil n'est plus ouvert que deux demi-journées par semaine. « Les files d’attente s’allongent, nombre de mes collègues sont minés par la peur de laisser des citoyens fragiles sans ressources », estime un agent.

    Une convention mise en place début 2025

    Interrogés par Marianne, France Travail, la CNAV et l’Unedic nous ont finalement communiqué leur nouvelle convention de partenariat visant à « fluidifier et rendre plus lisible le parcours des usagers » qui sera mise en place début 2025 ; et que tous les plus de 55 ans doivent lire avec attention avant de se retrouver dans la dèche, sans allocation chômage, et sans pension…

    Cette convention prévoit de sensibiliser les demandeurs d’emploi dès 55 ans à la préparation de leur retraite ; notamment les femmes afin qu’elles inscrivent leurs enfants dans leur dossier CNAV ; et fassent reconnaître leurs trimestres liés aux maternités. Ensuite, 15 mois avant l’âge légal de départ en retraite, un courrier sera envoyé par France Travail aux chômeurs concernés, les invitant à se rendre sur le site de la CNAC (Assurance retraite, N.D.L.R.), qui leur proposera un service dédié intitulé « Je complète ma carrière et déclare mes enfants ».

    La CNAV s’engage alors à leur répondre dans un délai maximum de 4 mois. Une attestation indiquant l’âge de départ à la retraite sera ensuite établie et transmise à l’assuré, ainsi qu’à France Travail. Pour les personnes qui ne seraient pas à l’aise avec les services en ligne, France Travail annonce « un parcours personnalisé adapté. »

    À LIRE AUSSI : Jérôme Leroy : "France Travail est là pour rappeler au pauvre, cette feignasse, de ne pas se croire tout permis"

    S’ils ne répondent pas à cette première sollicitation, les demandeurs d’emploi seront recontactés par France Travail, 7 mois avant l’âge légal du départ à la retraite, afin de leur rappeler l’obligation de fournir une attestation de régularisation de carrière (ARC), sous peine de voir le versement des allocations arrêté ou suspendu.

    Dans le même temps, France Travail transmettra mensuellement à la CNAV la liste des demandeurs d’emploi dans ce cas-là, avec leur contact, afin que les Carsat leur proposent des rendez-vous « dans les plus brefs délais ». Enfin, ultime promesse : « nous mettons en place un circuit de signalement des dossiers individuels entre les équipes régionales de France Travail et de la CNAV, assorti d’un engagement à proposer un rendez-vous dans les 15 jours pour régler toute situation urgente », lit-on noir sur blanc dans cette convention.