• Niches fiscales : quand le robinet d’aides à l’outre-mer coule à flots

    SACRÉES NICHES FISCALES. L’État a mis en place plusieurs niches fiscales afin d’encourager l’investissement outre-mer. Mais les effets sont loin d’être ceux escomptés.

     

    L’affaire des avions d’Air Tahiti Nui illustre parfaitement les failles du dispositif « Girardin industriel ».

     

    Saint-Barthélemy, Saint-Martin, la Polynésie française, Wallis-et-Futuna… Les territoires ultramarins ont fait depuis longtemps le pari du tourisme. Problème, les infrastructures, l'offre d'hébergement et les liaisons aériennes sont souvent à la traîne.

    Pour pallier les manques, l'État a mis en place plusieurs niches fiscales, afin d'encourager l'investissement outre-mer. Ces aides représentaient une dépense fiscale de 827 millions d'euros en 2022, soit une hausse de plus de 43 % depuis 2017.

    Comme ces collectivités sont fiscalement autonomes, ces aides ne peuvent être apportées directement aux entreprises qui y sont domiciliées. Lorsqu'une entreprise ultramarine souhaite obtenir un avantage fiscal, elle doit donc passer par une entreprise domiciliée en métropole. C'est elle qui touche les deniers des contribuables, qu'elle rétrocède partiellement à son partenaire d'outre-mer.

    Effet collatéral de ce montage alambiqué, une grande partie de la défiscalisation censée profiter à l'outre-mer reste en réalité en métropole. C'est une des raisons qui en explique le coût budgétaire faramineux par emploi directement créé : 700 000 euros dans le cadre du dispositif appelé le « Girardin industriel », chiffre inchangé de 2012 à 2023.

     

    L'affaire des avions d'Air Tahiti Nui

    L'affaire des avions d'Air Tahiti Nui illustre parfaitement les failles de ce dispositif. En 2015, la compagnie aérienne Air Tahiti Nui (ATN) achète à Boeing deux longs-courriers Dreamliner. La compagnie aérienne peut, en vertu de cet achat, prétendre à une déduction d'impôt de 97 millions d'euros. Encore lui faut-il le concours d'une entreprise fiscalement domiciliée en métropole. La Cour des comptes s'est fendue d'un rapport sur cette affaire en 2022. Les rapporteurs, qui en ont pourtant vu d'autres, évoquent un montage financier d'« un niveau de complexité rarement atteint » dans lequel interviennent des banques et des sociétés de portage… Ces derniers avaient mis au pot 97 millions d'euros. Cinq ans plus tard, leur bénéfice est de 11 millions d'euros ! Pas « justifié », dit la Cour des comptes.

    Bel euphémisme. Le risque de perte pour les investisseurs était nul. Même en cas de faillite d'ATN, les investisseurs auraient conservé leur avantage fiscal en cédant les avions. De plus, un fonds de compensation les protégeait du risque de baisse de valeur de marché des avions. « L'avantage fiscal bénéficie de fait moins à l'entreprise concernée qu'à des banques désirant réaliser un placement financier rémunérateur », observe la Cour.

    Dans cette affaire, la perte fiscale pour les finances publiques s'élève à 115 millions d'euros. Pour quel impact sur l'économie locale ? L'aide fiscale était conditionnée à un engagement de maintien de l'emploi. Or, « le montant de la dépense fiscale représente, pour chaque emploi maintenu, un coût exorbitant », souligne le rapport de la Cour. 

    Le Covid étant passé par là, la Direction générale des finances publiques, chargée de contrôler l'engagement d'ATN, a toléré une diminution des effectifs de la compagnie de plus de 15 % et une exploitation réduite des avions. Mais, « il aurait été légitime de fixer un retour à ce seuil d'emplois dès le rétablissement des équilibres économiques de la compagnie », remarque la Cour.

    Elle souligne en conclusion que l'investissement d'ATN « aurait été mené à bien même sans aide de l'État », la compagnie s'étant engagée auprès de Boeing avant même d'obtenir l'agrément de défiscalisation. L'argent public s'est vraiment évaporé sous le soleil de Polynésie.


  • Ce qui attend la France, le mauvais élève de la zone euro, à Bruxelles

    En déficit excessif, la France va devoir respecter les nouvelles règles budgétaires européennes. Le laxisme français semble bel et bien dans le collimateur de la Commission…

     

     

    Emmanuel Macron en Allemagne, le 28 mai. À sa gauche, le chancelier Olaf Scholz et le ministre des Finances, Christian Lindner, avocats d’une orthodoxie budgétaire européenne.

     

    Le compte à rebours est lancé. Avant le 15 octobre, la France devra transmettre à la Commission européenne son projet de budget pour 2025 et au-delà. Un exercice délicat dans un contexte de nouvelles règles européennes et de finances publiques tendu. Mauvais élève de la zone euro depuis sa création, l'Hexagone ne fait plus rire personne à Bruxelles.

    En plus du budget annuel, la France doit présenter, le 31 octobre, une trajectoire financière de quatre à sept ans, assortie d'un programme d'investissements et de réformes. Entre-temps, le gouvernement devra jongler entre le Parlement français et les institutions européennes.

    Pour la France, l'équation est complexe. Soumise à une procédure pour déficit excessif, elle doit convaincre de sa capacité à redresser ses finances publiques. Michel Ba...

     

     


  • 67 % des Français favorables à l’incarcération systématique, même pour les courtes peines

    Dans son discours de politique générale, Michel Barnier a mis en avant plusieurs réformes relatives au système carcéral, prônant des peines plus courtes mais exécutées sans exception.

     

     

    Fraîchement nommé ministre de la Justice, Didier Migaud était en visite à la prison de la Santé à Paris le 24 septembre.

     

     

    Pour une majorité des Français, l'incarcération devrait être systématique. C'est en tout cas ce que montre un sondage CSA, réalisé pour CNews, Europe 1 et LeJDD révélant que 67 % des Français sont favorables à l'emprisonnement systématique de toutes les personnes condamnées, y compris celles qui écopent de courtes peines. Cette approche vantée par le Premier ministre Michel Barnier s'inscrit dans le cadre d'une méthode simple, mise en œuvre au début du siècle, qui a permis de réduire le temps moyen d'incarcération.

    Les réformes proposées par Michel Barnier s'inspirent en partie du modèle néerlandais. En effet, aux Pays-Bas, le temps moyen d'incarcération a été réduit, mais les peines, même courtes, sont exécutées systématiquement. Cette approche a conduit à une diminution significative du taux de criminalité, à tel point que les prisons néerlandaises se retrouvent souvent « en manque » de détenus. En ce sens, Michel Barnier espère que cette réforme, associée à une augmentation des places de prison, pourrait améliorer l'efficacité du système judiciaire français.

    Si ce sondage présente des avis opposés, cette question divise bien davantage selon la proximité politique des répondants. À gauche, une légère majorité (51 %) des sondés se déclare défavorable à l'emprisonnement automatique de tous les condamnés, y compris pour des peines courtes. Les sympathisants d'Europe Écologie Les Verts apparaissent comme les plus réticents, avec 57 % de réponses négatives.

    En revanche, à droite, l'emprisonnement systématique des condamnés suscite un large consensus. Près de huit électeurs des Républicains sur dix trouvent cette mesure pertinente, tout comme 86 % des sondés se positionnant à l'extrême droite. Enfin, les soutiens de la majorité présidentielle se montrent globalement favorables, avec 63 % de réponses positives.

    79 000 personnes incarcérées

    Le nombre de détenus en France a atteint un nouveau record le 1er septembre, avec près de 79 000 personnes incarcérées. Face à cette situation alarmante, le Premier ministre s'est également déclaré en faveur de la diversification « des solutions d'enfermement ». Ces mesures seraient actuellement « en train de s'affiner », a précisé le ministère de la Justice à France Info qui confirme que « le programme pénitentiaire va être poursuivi ». « La chancellerie et l'administration pénitentiaire travaillent dessus, conjointement », a-t-il ajouté.

    La fermeté affichée par Michel Barnier fait écho aux déclarations du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. « Il faut qu'il y ait des peines prononcées, que les peines prononcées soient des peines aussi exécutées. Il faut construire des prisons », a-t-il déclaré à TF1 le 23 septembre, le soir de son entrée en fonction.


  • « Je n’abandonnerai jamais » : Donald Trump de retour à Butler, avec le soutien d’Elon Musk

    Le candidat républicain à la présidentielle américaine a tenu un meeting dans la ville où il a échappé à une tentative d’assassinat en juillet dernier. Elon Musk était présent.

     

     

    Par E.A avec AFP

    Publié le 06/10/2024 à 12h02

     

    « Il y a douze semaines, ici même, un assassin a tenté de me réduire au silence, ainsi que notre mouvement. Ce monstre vicieux […] était proche d'y parvenir, mais la main de la providence l'en a empêché. » Donald Trump s'adressait à plusieurs milliers de personnes rassemblées dans la bourgade de Butler où il avait réchappé de peu à une tentative d'assassinat en juillet dernier.

    Devant une foule acquise à sa cause, le candidat républicain et ancien président des États-Unis a tenu un meeting sous haute protection, samedi 6 octobre, dans l'État pivot de la Pennsylvanie, un mois jour pour jour avant l'élection présidentielle du 5 novembre où il affrontera la vice-présidente démocrate Kamala Harris. Il est revenu sur la tentative d'assassinat, répétant sur un ton provocateur : « Je n'abandonnerai jamais, ne plierai jamais, ne me briserai jamais. »

    Le candidat républicain a ensuite marqué une minute de silence, à l'heure précise où les tirs ont retenti le 13 juillet dernier, rendant un hommage appuyé à la seule victime, Corey Comperatore, avant de reprendre son discours à l'endroit exact où il avait alors été interrompu. Il a également dénoncé ceux qu'il désigne comme « les ennemis de l'intérieur, bien plus dangereux que ceux de l'extérieur ».

    Le fervent soutien d'Elon Musk à Donald Trump

    « Ces huit dernières années, ceux qui veulent nous arrêter m'ont calomnié, ont tenté de me destituer, m'ont poursuivi en justice, ont essayé de m'enlever des bulletins de vote et, qui sait, même peut-être tenté de me tuer. Mais je n'ai jamais cessé de me battre pour vous et je ne cesserai jamais », a assuré l'ex-président à ses supporteurs.

    Ils étaient bien plus nombreux à être venus écouter Donald Trump que lors du précédent meeting à Butler, beaucoup étaient vêtus d'un t-shirt reprenant l'image de l'ancien président juste après la tentative d'assassinat, d'autres avec l'oreille couverte, rappelant le bandage qu'il avait porté les jours suivants.Avant son entrée sur scène, Donald Trump était précédé de son colistier J. D. Vance, sous les yeux de l'homme le plus riche du monde Elon Musk, des proches de victimes des tirs et des forces de l'ordre qui l'ont protégé. Invité à venir s'exprimer par Donald Trump, le milliardaire a présenté l'élection américaine comme « un combat qu'il ne faut pas perdre », craignant qu'il ne s'agisse, dans le cas contraire, « de la dernière élection, c'est ma prédiction ». « Le président Trump doit l'emporter, pour préserver la Constitution et la démocratie », a insisté Elon Musk.


  • Pourquoi les factures d’électricité pourraient flamber au 1er février 2025

    Le gouvernement envisage d’augmenter plus que prévu la taxe appliquée à la consommation d’électricité (TICFE), ce qui aurait un impact sur la facture de nombreux Français.

    Près de 40 % des Français pourraient voir leur facture d'électricité augmenter le 1er février 2025.

     

    Près de 40 % des Français pourraient voir leur facture d'électricité augmenter le 1er février 2025. © Mourad ALLILI/SIPA

     

    Pour boucler le budget 2025, le gouvernement doit trouver 20 milliards de recettes supplémentaires. Pour ce faire, Bercy travaillerait à une hausse plus importante que prévu des taxes sur l'électricité, révèle Le Parisien, samedi 5 octobre. Les consommateurs qui bénéficient d'une offre de marché pour laquelle les prix sont fixés librement par les fournisseurs devraient ainsi voir leur facture augmenter au 1er février 2025.

     

    Après la fin du bouclier énergétique, la TICFE (taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité) devrait retrouver l'année prochaine son taux d'avant la crise inflationniste. Le niveau de taxation passerait ainsi de 22,50 euros par mégawattheure à 32,44 euros, comme prévu par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Selon les informations du quotidien, ce retour à la normale ne devrait pas avoir trop d'impact sur les portefeuilles des consommateurs puisqu'en parallèle, les prix sur les marchés d'électricité baissent.

    Environ 4,5 milliards de recettes attendues

    Le gouvernement, lui, pencherait pour augmenter encore davantage la TICFE. Une hausse qui s'appliquerait aux abonnés en offre de marché, soit environ 40 % des ménages en 2023, selon la CRE. Pour ceux qui ont souscrit un contrat aux tarifs réglementés, pas d'inquiétude, toutefois la baisse de 10 à 15 % promise par Bruno Le Maire en juin dernier pourrait être moins importante que prévu.À LIRE AUSSI  Banques privées, conseillers en gestion de patrimoine, banques de fortune : à qui confier son argent ?

    Les experts estiment que cela pourrait rapporter 4,5 milliards de recettes à l'État. Un spécialiste du budget interrogé par Le Parisien craint cependant que cette hausse des tarifs ne soit « une bombe sociale ». « Cela va toucher énormément de foyers. Les moins aisés, dont les habitations ne sont peut-être pas les mieux équipées en termes de confort thermique et d'isolation, seront plus impactés que les autres », prévient-il.

     

     

     


  • Après la disparition d’un ministère de la Ville, la crainte d’une coupe dans les crédits

    Paris – Les élus redoutent des coupes claires dans le budget de la politique de la ville. Son portefeuille est repris par la nouvelle ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, Valérie Létard
     
    AFP - Tours HLM Thiais

    La nouvelle ministre du Logement et de la Rénovation urbaine Valérie Létard l’assure : c’est bien elle qui reprend le portefeuille de la Ville et ses programmes dans les quartiers défavorisés, en vertu d’un décret d’attribution non encore publié. Reste que l’intitulé de son ministère n’a pas bougé, quand les secteurs du handicap et des anciens combattants ont eux décroché des ministres délégués.

     

    « Savoir-faire ». Pour Catherine Arenou, maire DVD de Chanteloup-les-Vignes et vice-présidente de l’association Ville et Banlieue, pas question de faire un procès d’intention à la nouvelle ministre. Proche de Jean-Louis Borloo, le père du renouvellement urbain, Valérie Létard a beaucoup travaillé sur la politique de la ville en tant qu'élue de Valenciennes.

    « Avec Catherine Vautrin (ex-présidente de l’Anru, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, ndlr), on a affaire à deux personnalités qui ont un vrai savoir-faire », observe Mme Arenou. Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre n’a pourtant glissé aucune référence aux 1 580 quartiers dits « prioritaires de la politique de la ville » (QPV) et à leurs plus de 5,4 millions d’habitants.

    « Conception réductrice ». Pour couper court aux critiques, la nouvelle ministre se rendra à Lille lundi pour visiter un chantier d’insertion « relevant de la politique de la ville ». « On a toujours imaginé que le jour où disparaîtrait la politique de la ville - et on souhaite qu’elle disparaisse - c’est qu’on n’en aurait plus besoin », observe Driss Ettazaoui, vice-président de Ville et Banlieue. Sauf qu’aujourd’hui « les fractures n’ont jamais été aussi importantes entre la ruralité et les quartiers, les villages et nos cités », remarque-t-il.

    « Bien sûr que la qualité des bâtiments est fondamentale », souligne Agnès Bourgeais, maire DVG de Rezé (Loire-Atlantique), en référence à la rénovation urbaine, « mais nos quartiers ne se limitent pas à un problème de béton ». « Oublier les habitants de nos quartiers populaires, c’est dire à tous ces jeunes qu’ils n’ont pas complètement leur place dans notre société », abonde Johanna Rolland (PS), présidente de France urbaine.

    AFP - Valérie LétardLa ministre du Logement et de la Rénovation urbaine Valérie Létard sur le perron de l’Elysée à Paris, le 1er octobre 2024.  -  Ludovic MARIN - Paris (AFP)

    Pour Thomas Kirszbaum, chercheur associé au Ceraps à Lille, l’intitulé de « rénovation urbaine », traduit « une conception réductrice de la politique de la ville, qui ne marche plus que sur une jambe, celle de la transformation physique des quartiers, en oubliant de répondre aux problématiques sociales des habitants ». « Le pari qui fut celui de Martine Aubry de mobiliser l’Education nationale, le ministère de l’Emploi, etc., en supposant qu’on pouvait se passer d’une politique spécifique a fait long feu », analyse-t-il. « On a structurellement besoin d’une politique spécifique précisément parce que les politiques publiques de droit commun ne font pas leur boulot », poursuit-il, estimant que les quartiers prioritaires « n’ont plus de prioritaire que le nom ».

    « Complètement disparu ». Loin d'être un « loupé », la disparition d’un ministère dédié est « un choix », observe le sociologue Renaud Epstein, rappelant que la ruralité a elle toute sa place, avec une ministre déléguée. « Ce choix vient parachever une dynamique d’effacement de la politique de la ville à l'œuvre depuis dix ans », juge-t-il. Les différents programmes de « rattrapage » associés à cette politique, qu’ils soient sur l'éducation, le vivre ensemble, la culture ou le développement économique, « existent toujours », mais il faut selon lui « ne plus l’afficher ».

    « Les gouvernants sont tétanisés par la pression du Rassemblement national et désormais de la droite, avec un discours qui consiste à dire qu’on met des milliards dans les banlieues, sous-entendu pour les ‘Noirs et les Arabes’, pendant que la France, supposée périphérique, souffre », analyse-t-il en estimant que les émeutes de 2023, les plus importantes qu’ait connues la France depuis 2005, « n’ont donné lieu à aucune annonce, si ce n’est sur l’ordre et la sécurité ».

    Plus globalement, les élus s’interrogent sur la pérennisation des 624 millions d’euros de crédits alloués en 2024 à la politique de la ville, dans un contexte de disette budgétaire. Selon plusieurs personnes proches de ces dossiers interrogées par l’AFP, les coupes pourraient aller de – 14 % à – 25 %, voire plus. « Les politiques de la ville ont complètement disparu pour Michel Barnier, et elles disparaîtront dans le budget », assure même l’une d’entre elles.

    Hélène DUVIGNEAU

    © Agence France-Presse