En Gironde, quels sont les symptômes de cette « asphyxie » que vous dénoncez ?
On a perdu en deux ans 210 millions d’euros de droits de mutations. Pour le budget 2025, nous devons faire 70 millions d’euros d’économie en fonctionnement et 110 millions en investissement, et ça, sans les mesures à venir du PLF. On n’a pas d’autre choix que de rogner sur les dépenses. On a déjà baissé nos dotations dans les collèges. On a baissé de moitié les aides aux communes et donc l’aide aux associations. Des départs à la retraite ne vont pas être remplacés au Département, alors qu’on veut créer des postes pour notamment mieux assurer le contrôle des assistantes maternelles et des familles d’accueil. Est-ce que l’État veut asphyxier le service public départemental et le confier demain au privé, pour des Ehpad Orpéa ou des crèches People & Baby ?
Les présidents des Départements de gauche, aux Assises d’Angers, vendredi 15 novembre.Culture, sport, tourisme, aide aux communes : ce ne sont pas des compétences obligatoires et pourtant, vous intervenez dans ces domaines au nom d’une « politique volontariste »…
Mais quand on aide un club sportif pour faire du handisport, c’est du sport ou du handicap ? Quand on finance des dispositifs pour faire entrer la culture dans les Ehpad et participer à en faire des lieux de vie, ce n’est pas de l’aide aux personnes âgées ? Le tourisme, l’aide aux communes, c’est 15 millions d’euros. Le sport, la culture, 7 ou 8 millions. Nous, c’est 180 millions qu’on cherche.
Certains de vos collègues ont menacé de suspendre le versement du RSA et la prise en charge des « mineurs non accompagnés » : iriez-vous jusque-là ?
Plutôt que nous placer dans l’illégalité en ne prenant pas en charge les MNA, je préfère obtenir la reconnaissance de la dette de l’État. Pour les enfants sous protection ou les adultes handicapés, l’État nous doit 21 millions d’euros. S’il le faut, on ira au contentieux en mettant l’État au tribunal. Le RSA était pris en charge à 89 % par l’État et 11 % par les Départements. Aujourd’hui, c’est 43-57. On a eu progressivement une reprise en main par l’État des recettes qui nous étaient affectées. On n’est plus dans l’esprit originel de la décentralisation, qui consistait à choisir le bon niveau de collectivité pour le bon niveau d’action publique, avec les ressources qui allaient avec. Quand on a transféré la protection de l’enfance aux Départements, c’est parce qu’on estimait que c’est le meilleur échelon de proximité pour le faire. Qu’est-ce que l’État ferait mieux que nous, aujourd’hui ? Nous pointer du doigt, c’est profondément injuste.
« Si les Départements s’effondrent, c’est toute la nation qui vacille. L’abandon des territoires ruraux, on sait ce que ça produit. »Qu’attendez du grand public ?
Je veux faire la démonstration que l’action publique sert des vies et des personnes. C’est donner à voir ce qui arrive concrètement si demain, le Département n’a plus les moyens d’être à la hauteur de ses missions. Si les Départements s’effondrent, c’est toute la nation qui vacille. L’abandon des territoires ruraux, on sait ce que ça produit. Avec tout le corollaire des mobilisations sociales, dans les rues et dans les votes.